Sitôt entré dans l’enceinte de la fondation Cartier, voilà le visiteur accueilli par un poulet géant déplumé suspendu au plafond. Désorienté, il tourne alors sa tête vers une femme en miniature. Ses deux mains sont prises par des sacs de courses, et elle porte un bébé aux yeux grands ouverts …
Les sculptures de Ron Mueck sont déstabilisantes : hyper-réalistes, elles nous renvoient à notre propre réalité, mais toujours déformée. Démesurément grande comme ce couple de personnes âgées sous un parasol, ou très petite comme cette femme aux fagots de bois, voici le visiteur tour à tour comme dans Alice au pays des merveilles lorsqu’elle grandit ou rapetisse le temps d’avaler une boisson ou de manger un gâteau.
Le visiteur erre alors, se rapproche des sculptures pour trouver une faille à ces hommes et femmes. En vain. Tout est minutieusement pensé. Face à lui des hommes plus vrais que nature.
Une certaine tristesse émane tout de même de ces sculptures : ce couple de personnes âgées a beau être uni, ils sont aussi courbés par le poids des ans, las aussi. Et que dire de ce vacancier flottant sur son matelas ? N’est-il pas à la dérive ? Et cet autre homme sur une barque, les yeux fixant un être ou un objet que personne ne verra ?
Bien entendu, on ne peut s’empêcher aussi de faire des parallèles avec d’autres oeuvres d’art. La vieille femme sous son parasol avec son maillot bleu serait-elle « Une femme au vieillard » à l’instar de « la Vierge à l’enfant » ? Et que penser de cet homme noir qui regarde sur son flanc couler du sang ? Ne peut-on pas le rapprocher d’une certaine figure christique, ou même du tableau de Caravage représentant l’incrédulité de Saint-Thomas ?
Mise en abyme de l’Art ou bien tout simplement de notre condition humaine, les sculptures de Mueck questionnent et dérangent le visiteur tout en le bluffant.
Une exposition incontournable qu’on peut voir jusqu’en septembre à la Fondation Cartier (Boulevard Raspail, Paris.)
Le making-of de l’expo :