Une belle maison, la mer pas très loin, un père venu avec sa maîtresse du moment : Cécile avait tout pour passer un bel été. Malheureusement la venue d’Anne risque de compromettre la dolce vita de ce trio.
Cécile mène une vie de bohème chic avec son père. Du moins, c’est le terme qu’on emploierait aujourd’hui. Une belle insouciance se dégage de la vie de cette famille. L’argent ne pose aucun problème, même si personne ne l’étale non plus. Une belle vie rythmée par des après-midi passés à se dorer sur la plage, des soirées chez des amis. Oui, la douce vie. Le père de Cécile est veuf depuis de nombreuses années et il aime passer de femme en femme. Elsa, sa dernière conquête, est plus jeune que lui, un brin superficielle sur les bords, à l’image en somme de la vie menée par le père et la fille.
L’arrivée d’Anne, autrefois amie avec la mère de Cécile, va donc perturber cette joie de vivre. Femme à la fois belle et mystérieuse, elle sait imposer ses desiderata. Pour commencer, il n’est pas question pour elle que Cécile mène cette vie de patachon !
D’ailleurs puisqu’elle a raté son baccalauréat, elle doit travailler de nouveau certaines matières ! Et il est inutile qu’elle continue de fréquenter ce jeune homme. Qui sait ce qui pourrait lui arriver …
Jusqu’où iront les chamboulements crées par Anne ?
Voici un récit qui reflète bien l’insouciance. Insouciance des belles années d’après guerre, insouciance d’une jeunesse dorée. Comme le récit est fait du point de vue de la jeune narratrice de 17 ans, le poids des tracas adultes ne pèse pas encore sur elle. C’est un roman qui incarne pour moi ces années-là. Ces années qu’une grande tante m’a racontées quand je n’étais encore qu’une enfant. Tout y est ou presque. Les belles voitures, les villas baignées de soleil, les virées avec les copains. C’est aussi la découverte des corps et l’apprentissage de la sexualité.
Oui, j’ai vraiment retrouvé les récits que cette grande tante me relataient. De cette histoire s’échappe donc un petit air désuet que j’ai aimé.
Mais sous cette insouciance apparente va se greffer un côté sombre de l’homme. Celui de la mesquinerie et de l’égocentrisme.
Cette jeune fille qui voit son horizon rétrécir à vue d’œil à cause d’Anne compte bien ne pas se laisser faire. A l’insouciance de l’adolescence arrive alors la férocité et la vengeance sourde, sentiments lui aussi symptomatiques de cet âge-là. Cécile se voit d’ailleurs comme un metteur en scène et cette fonction lui plaît. Tel un marionnettiste, cette jeune fille pense du haut de ses 17 ans pouvoir régir le petit monde qui l’entoure. Bien présomptueux de sa part. D’ailleurs, la fin peut faire penser à une conséquence de cette hybris ou démesure … ou en bien moins tragique, à un simple apprentissage de la vie.
Premier roman d’une jeune femme de 19 ans, Bonjour Tristesse a fait pas mal de vagues lors de sa sortie. J’ai du mal à y déceler le soufre qui mit le feu aux poudres. Peut-être que ce récit, flirtant avec le genre biographique, était jugé bien décalé pour une si jeune femme en 1954 ? La révolution de mai 68 n’était pas encore passée par là, et cette Cécile pouvait peut-être déjà incarner une forme de féminisme bien révolutionnaire ?
Du coup, j’ai aussi du mal à comprendre l’engouement qu’eut le roman à sa sortie. Certes, le portrait des différents personnages est bien léché, et le lecteur lit avec une petite appréhension les machinations de cette adolescente -signe d’une tension continue au fil du récit- mais ce livre n’a pas été pour moi une révélation.
La préface parle même d’un véritable scandale provoqué par des références explicites à la sexualité féminine et à cause d’un style désinvolte et mordant. De nos jours, ce récit est vraiment très soft et la sexualité est au contraire simplement évoquée par petites touches. Pas de quoi fouetter un chat …
C’est là qu’on voit le changement de mœurs tout de même .
Un roman bien ficelé, qui est le reflet d’une époque, mais il m’a manqué quelque chose pour pouvoir être totalement séduite.
Ed. Pocket (j’ai mis une autre couverture que je trouve plus jolie), 154 pages, 3€90
Celsmoon est plus enthousiaste que moi.