Commentaires sur La vie à Pâââris !

Paris en ce moment, c’est un chouille désert. Preuve à l’appui avec cette photo prise il y a quelques jours sur le pont de Grenelle. Dans l’année, cette vision relèverait de l’utopie.

Z’avez remarqué le monument derrière le lampadaire gauche ?

En plus grand ça donne :

Plus petite que l’originale ; mais le voyage est moins cher pour la voir.

J’ai mis du temps à m’habituer à la vie parisienne. Enfin, j’ai surtout eu du mal à m’habituer à la conduite des parisiens.  En gros, c’est la jungle !   
L’an dernier, je devais plusieurs fois par semaine prendre un certain rond-point.
Celui-ci :

J’avais plusieurs défauts :
1. Être une femme
2. Être blonde
3. Être immatriculée 14

Du coup les premières fois, j’avais des sueurs en arrivant près de l’Arc. Profiter de la vue ? Mwahahahahaha ! Non.
Roule ou crève.
Une des premières choses à savoir : ne jamais s’arrêter ! JA-MAIS.
Sinon tu ne repars plus.
Maintenir donc une certaine vitesse tout en regardant à gauche et à droite simultanément. Comment ? En développant le caméléon qui est en chacun de nous. Aussi depuis que je conduis à Paris, je peux à loisir bouger l’œil droit indépendamment de l’œil gauche. 
Avec l’œil gauche, je regarde les voitures qui ne sont pas prioritaires (car sur ce merveilleux rond-point, la priorité est à droite). En gros, cet œil n’apporte pas grand chose. Si ça vient de la gauche, c’pas grave, je fonce. Ils s’arrêteront bien. 
La technique est donc d’entrer sur le rond-point à fond les ballons, histoire de montrer qui est le chef ! (Puis si je rentre doucement, j’ai 15 000 voitures qui me klaxonnent.)
L’œil droit par contre est indispensable. Car de la droite vient le danger. (Vous remarquerez que jamais un romain n’aurait pu dire ceci. Pour lui, de la droite vient le bon augure.)  Et il y en a des VPD (voiture potentiellement dangereuse) !
Alors voilà, une fois insérée dans la circulation, il faut à la fois regarder les voitures qui viennent de droite, sans jamais s’arrêter (important), mais aussi repérer l’axe de la sortie. Si on le loupe, on est bon pour un tour de manège gratuit. Là l’œil gauche qui ne sert pas beaucoup peut aider  à repérer la sortie.
Je récapitule. Les mains à 10 h 10, les yeux de caméléon, le pied droit sur l’accélérateur. 

Au début, c’était corsé. Au bout de quelques mois, ma technique était bien rodée. Maintenant, quand une copine monte avec moi en voiture, elle se demande si elle ne va pas laisser quelques plumes sur le rond-point.
Le rond-point de l’étoile ? Pfiuut, les doigts dans l’nez mon ami.
Et quand je retourne à Caen, mon frère se marre à côté de moi et me traite de parisienne.
 

Commentaires sur Le musée du Quai Branly

De loin, si vous voyez des cubes rouges, jaunes et oranges, vous pouvez être sûr que vous avez en face de vous le musée du quai Branly (7ème) que l’on doit à l’architecte Jean Nouvel (Je connais bien ses créations car j’ai habité plus de 10 ans dans une ville dont les bâtiments ont été faits par Nouvel …), musée consacré aux arts premiers d’Océanie / Asie / Afrique / Amérique.
L’accès à ce musée est très original : une longue rampe d’accès blanche, puis noire (le visiteur est plongé dans l’obscurité) mène aux sept mille m2 d’expo.(On oubliera donc les talons ou autres chaussures à torture.)
Dès la fin du tunnel, j’ai été accueillie par une gigantesque statue androgyne : barbe au menton, mais poitrine développée, et les bras levés pour attirer la pluie.
Pas de sens de visite imposé, du coup j’ai commencé par l’Amérique (Etais-je encore habitée par l’art Hopi de Claudie Gallay ? D’ailleurs je n’ai pas été déçue car j’ai vu des Katsinas.)

Les objets sont bien mis en valeur derrière des vitres et les écriteaux sont assez explicites. Ainsi j’ai appris pas mal de choses (normal, je ne connaissais quasiment rien.)
La natte à fourmis ou à guêpes est une épreuve imposée à chaque jeune homme qui entre dans l’âge adulte. Cette natte remplie de fourmis ou de guêpes est posée sur son corps. Aussi s’il réussit cette épreuve, il pourra sereinement affronter la vie.

Quant aux vases, ils sont de forme animale ou humaine car ils montrent que le corps est avant tout un contenu.
Lévi-Strauss (noooon pas le jean !) a constaté que tous les mythes amérindiens étaient liés entre eux, qu’on retrouvait les mêmes constantes d’une culture à l’autre. Ainsi la culture aztèque a repris pas mal de divinités des huastèques.
Les plumes mais aussi les crocs et les griffes qui ornent les vêtements ou les masques sont un réel dépaysement pour les yeux. (Les petits devraient aimer.)

Passons au continent africain.
Là encore le dépaysement est total. Un immense masque de requin de plus de deux mètres ouvre cette partie.

Un peu plus loin, j’ai appris que sur ce continent aussi la tortue était un animal malin.
Ainsi selon la légende, le vent et elle se défièrent. Le vent était sûr de gagner, il laissa donc la tortue partir avant lui. Forcément c’est la tortue qui arriva la première … ça ne vous rappelle rien ?

A quoi servent ces statuettes ? 

© Musée du quai Branly. Photo : Patrick Griès, Valérie Torre

La femme les porte sur la tête. Juste après la perte de son enfant. Ces statuettes rendent donc hommage à l’enfant disparu.

Dans la partie consacrée à l’Océanie, j’ai été fascinée par des peintures sur écorce. Elles permettent de réactiver le temps du rêve.
Sur cette peinture, la magie se voit aux « branches » qui poussent sur ces hommes.

En somme, ce musée est dépaysant et enrichissant ; cela change des œuvres classiques. A l’étage, d’ailleurs, l’exposition « Planète métisse » permet de revenir sur certaines confrontations classique /ethnique –  exotique / typique etc.
Si vous emmenez un enfant, vous avez des visites animées par un conteur.

Le site du musée.

Commentaires sur Le Complot de l’ombre d’Anne Ferrier


Ed. Livre de Poche Jeunesse, 125p, 4€90

Fin du XVème siècle, à Bourges. Gaspard est un jeune garçon bien curieux et intrépide qui aime faire tourner en bourrique le cuisinier de Jacques Cœur, l’argentier du Roi. En somme, il mène une vie insouciante de gosse.
Alors qu’il essayait une fois encore d’échapper au courroux du cuisinier, il surprend une conversation inattendue.
Alors comme ça, certains fomenteraient de tuer Jacques Cœur ?   
Gaspard n’en revient pas !
Une fois les intrigants partis, il court vite le dire à son père … qui ne croit pas un mot de ce que vient de lui dire son garçon.
Son parrain, Ymbert de Gontard, le prendra peut-être au sérieux, lui ?
Malheureusement un drame lui fait oublier cette menace qui pèse sur l’argentier. Le lendemain Gaspard retrouve son père mort. Mais de quoi est-il mort ? Est-ce un assassinat comme le prétendent les fossoyeurs ? Et auprès de qui demander de l’aide ?
Son parrain est en voyage et Gaspard est bien désemparé. Pour comprendre la mort de son père, il devra trouver de l’aide auprès de personnes qu’il pensait peu recommandables. Ses pas le mèneront jusqu’à Jacques Cœur …

Quand j’étais gamine, j’allais souvent près de Bourges (un oncle – une maison de campagne …) et je m’étais prise d’affection pour Jacques Cœur après avoir visité sa grand’maison. Du coup, lire ce roman m’a replongée vingt ans en arrière et m’a redonné envie de visiter de nouveau cette ville.
J’ai aimé aussi ce Gaspard qui est bien obligé de grandir plus vite que prévu et découvre avec étonnement que les apparences sont souvent trompeuses.
Comment ? Un alchimiste ne court pas après l’immortalité ?

Les adolescents de 11-13  ans devraient aimer les multiples rebondissements (ils aiment quand il y a de l’action. ) tout en découvrant le moyen-âge par le biais de cette histoire palpitante.
De mon côté, j’ai pris plaisir à lire cette histoire, et j’ai souri plusieurs fois :

Alors que Gaspard pose des questions trop indiscrètes à Aaliz (une jolie jeune fille)
– Vous êtes si agaçant !
Là, c’était le chaudron qui se moquait de la marmite. Moi, agaçant ?
 

Ou encore après une balade dans des sous-sols :
J’éprouvais soudain une immense compassion pour tous les vers de terre du monde, et me promis de les traiter dorénavant avec davantage de respect.

La fin de l’histoire laisse présager une suite : un récit de voyage peut-être ?

Le site d’Anne Ferrier pour découvrir ses autres livres.

Dans les veines ce fleuve d’argent de Dario Franceschini

Ed. L’Arpenteur, 152p, 13 €

Primo Bottardi est un homme singulier : il a toujours confondu le silence avec le froid. Seul le bruit peut le réchauffer. Mais parmi les paroles chaleureuses de sa femme et de sa fille, il mène une existence paisible.
A l’automne de sa vie, alors qu’il se laisse aller dans un moment de silence, il pense à son vieil ami Massimo Civolani qu’il n’a pas revu depuis plus de quarante ans. Celui-ci lui avait posé une question et Primo ne lui avait pas répondu. Plus de quarante après, l’urgence de lui répondre s’impose.
Mais après tant d’années, il ne sait pas où le trouver. Miraglia, son ancien professeur, le sait peut-être ?
Malheureusement, hormis une carte postale reçue il y a plusieurs années, le professeur ne sait pas où vit Civolani. Il l’envoie vers Scabbia qui semble avoir gardé contact avec lui. Mais là non plus, la réponse est imprécise. Hormis le nom d’un village, Lenticchia, l’homme ne sait pas où se trouve Civolani.
Primo décide de partir en train dès le lendemain. Arrivé au village, il fait la connaissance d’une femme qui a très bien connu Civolani. Mais cet homme -qui désormais se fait appeler Capoccia – pêche l’esturgeon et il ne vit plus ici : il est plus en amont sur le fleuve.
Commence alors une longe route pour Primo. Ses compagnons de voyage ? Le Pô bien-sûr, qui recèle de nombreux trésors, et un charretier Francesco Artioli.
« Tout le monde me dit que je devrais prendre un de ces camions ou je ne sais comment on les appelle, mais je suis bien comme ça et je ne pourrais pas me séparer d’elle. »

La narration est comme la charrette : elle prend son temps (et qu’est-ce que j’ai savouré ce temps suspendu !) et il n’est pas rare que des digressions pointent le bout de leur museau dans ce roman.
Ainsi on apprendra qu’un village a été plongé dans le brouillard et que seules les femmes étaient capables de s’orienter dans cette brume ; qu’ailleurs des villageois perdent leur identité chaque jour … que chaque jour ils recommencent une nouvelle vie. Le Pô, toujours en arrière plan, apporte lui aussi son lot de légendes.
L’écriture du roman est à l’image du fleuve : elle tourne et s’engouffre dans tous les recoins de la mémoire. (Bravo à Chantal Moiroud pour son travail de traduction.)

J’ai apprécié cette narration lente : dans notre monde où tout va extrêmement vite,  ce choix est audacieux. Mais j’ai vraiment aimé goûter aux joies du fleuve, aux couleurs brumeuses des paysages, à l’onirisme qui prend le lecteur au détour du Pô.
Dario Francheschini signe là un premier roman rempli d’une douce magie  perceptible dès les premières pages.
(Le livre a été récompensé par le prix Bacchelli et le prix du premier roman au festival de Chambéry.)

J’ai souri en lisant le passage suivant :
« Excuse-moi pour le désordre, poursuivit-il en montrant à Primo les livres posés partout, sur les chaises, sur la table, les radiateurs, le carrelage de ciment gris brillant. Ce n’est pas un problème de place, c’est seulement que j’ai abandonné. Je n’ai plus assez de force d’âme pour avoir la cruauté de les mettre sur l’étagère d’une bibliothèque.
Vois-tu, dit-il en chassant la poussière du dos d’un volume relié de cuir rouge, petit déjà, lorsque je restais éveillé tout la nuit à lire un livre, je ne supportais pas l’idée que les hommes et les femmes que je venais de voir doivent finir serrés et immobiles dans une bibliothèque… »

Quant à la question qui porte Primo vers son ami ? C’est à la fin du roman que vous la connaîtrez et vous commprendrez pourquoi Primo a entrepris ce voyage.

Commentaires sur Un grand moment de solitude

S’il existe un moment redouté chez les professeurs, c’est bien le jour de l’inspection. Dans le pire des cas, la direction peut nous prévenir la veille. Moi j’ai été mise au parfum dès le mois de septembre. 
Dès la rentrée je le savais.
Première année dans cet établissement, première année de collège (avant j’avais des plus grands), première inspection. L’année des premières fois en somme. Enfin pas toutes, j’vous rassure.   

Le tout était encore de savoir quand l’inspecteur viendrait. Et là, impossible de savoir. Secret des Dieux.
Au bout de quelques mois, l’inspection était une idée lointaine, je pensais même qu’on m’avait oubliée. L’inspection était devenue une boutade. Alors, toujours rien ?  L’Arlésienne en fait.
Mais vers la fin de l’année, l’inspecteur s’est subitement dit qu’il pouvait encore venir me voir.
Oh, tiens j’ai une heure à perdre, et si j’allais voir Leil.
Je fus donc prévenue trois jours avant la visite.
Trois jours.
L’Homme s’en souvient encore… L’Enfer venait de s’ouvrir sous ses pieds.
Trois jours pour revoir si ma progression annuelle tenait la route, trois jours pour regarder si le cahier de textes était tenu à jour (on doit le remplir tous les jours, coller tous les devoirs … Le cahier de textes est l’équivalent de la boîte noire des avions). Trois jours pour que tout brille comme les chromes d’une moto.
Ce que j’avais prévu de faire me plaisait bien, je décidai donc de ne rien toucher.
La veille fut terrible. Crise d’angoisse puissance mille. Et là on comprend mieux pourquoi le mot « hystérie » vient d’utérus. Seules les femmes sont capables de se mettre dans cet état-là.
– Mais je suuuuuuuuuuuuuuiiiiiiiiiiiiiiiiiiis qu’une groooooooooooosseeeeeeee nuuuuuuuuuuuuuulle. Je ne sais pas parleeeeeeeeeeeeeeeeeeeer. Siiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii c’est vrai. (avec les tremblements qui vont bien)
L’homme ne savait pas trop comment gérer cette furie qui venait de prendre vie dans le salon. Même s’il a le même couteau que Mac Gyver, c’est plus difficile de réparer une femme qu’une platine DVD. Le prendre à la rigolade ? Oui, mais elle est bien partie, là. Faire la grosse voix ?
Ce qu’il fit.
-Maintenant tu t’arrêtes !
Et comme on dit, certaines p’tites phrases valent mieux qu’un long discours.
Leil reprit forme humaine et on put continuer le repas chez les Leil.

Jour J.

J’avais prévenu les élèves de la venue de l’inspecteur. J’avais les morpions deux heures consécutives et la visite devait se faire la seconde heure.
Début de l’heure. Point d’inspecteur. Je commence le cours.
Les élèves s’impatientent eux aussi (ils ont à vrai dire aussi peur que moi).
Quand j’entends les coups sur la porte, j’essaie de garder mon calme et ouvre la porte.
Bonjour / Bonjour. Je vous ai préparé une p’tite table dans le fond. Merci Merci.
Je reprends la lecture du texte puis demande aux élèves quelles sont leurs impressions.
Voici le début du texte :

Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit ?
Ces doux êtres pensifs que la fièvre maigrit ?
Ces filles de huit ans qu’on voit cheminer seules ?
(…)

Mes sportifs en herbe veulent bien faire, lèvent la main. Disent des trucs pas bêtes du tout. Je reprends confiance. Nulle bêtise à l’horizon, point de pleutre non plus.
Sauf que je n’avais pas vu un cheval de Troie à ma gauche.
Doigt levé = nulle méfiance.
Tom, élève pas très doué mais volontaire lève la main. Content de m’apporter du grain à moudre.
Mais m’dame, ces filles de huit ans, seules qui marchent dans la nuit, ben on pourrait p’tre se dire que ce sont des prostituées, non ?

Et là, un quart de seconde, j’ai cru que mon inspection était foutue. Je voyais déjà la classe partir en cacahuète dès le mot « prostituée » prononcé.  (On pourra noter que l’élève n’a pas dit « pute ». Bel effort de sa part.)
Même pas 5 minutes que l’inspecteur était rentré et voilà qu’un élève me parle de prostituée de 8 ans !
Pauvre Victor Hugo.
– M’enfin, non Tom, ces jeunes filles vont au travail !
Regard vite fait vers l’inspecteur. Il n’a pas l’air de s’étouffer. Je me tourne vers les autres :
-Alors, d’autres idées ?
En priant pour qu’ils ne me sortent pas d’autres énormités.

A la récré, la performance de Tom avait déjà fait le tour du collège.

Commentaires sur La Muette de Chahdortt Djavann


Ed. Flammarion, 117p, 14 €

« J’ai quinze ans, je m’appelle Fatemeh, mais je n’aime pas mon prénom. Dans notre quartier, tout le monde avait un surnom, le mien était « la nièce la muette ». La muette était ma tante paternelle. Je vais être pendue bientôt. »

Voici comment débute le manuscrit que découvre un jour une journaliste française dans sa boîte aux lettres. Le colis contient le manuscrit original en persan et sa traduction. Intriguée par cet envoi, la journaliste se met à lire le récit de cette jeune femme.   
En attendant le jour de sa condamnation à mort, Fatemeh choisit d’écrire l’histoire de sa tante sur un petit cahier, faveur du gardien de prison, « pour que quelqu’un se souvienne de la muette et de moi, parce que mourir comme ça, sans rien, m’effrayait. Peut-être qu’un jour quelqu’un lira ce cahier. Peut-être qu’un jour quelqu’un me comprendra. Je ne demande pas à être approuvée, seulement comprise ».

Elle explique au lecteur que sa tante n’a pas toujours été muette ; mais que suite à un traumatisme à l’âge de dix ans, elle a choisi de se taire à jamais. La petite fille déjà si déterminée est devenue une femme libre de 29 ans : elle ne porte pas de voile, tire sur sa cigarette comme un acteur américain. Bref, elle ne connaît aucun interdit. Autour d’elle, les femmes commencent à jaser, allant même jusqu’à la traiter de folle. ; car pour ces femmes, seule une folle peut se comporter de cette manière.

Fatemeh ne porte pas ce regard là sur sa tante. Fascinée par sa beauté et sa démesure, elle se sent plus proche d’elle que de sa mère. Aussi c’est tout naturellement qu’elle tentera vainement de cacher à sa mère la relation charnelle entre sa tante et un homme. Cet acte d’amour sera mal très vu dans ce pays où le mollah décide des punitions …

Le début du roman ressemble beaucoup au livre de Victor Hugo Le Dernier jour d’un condamné. Est-ce une fiction ? Un fait divers ? Peu importe. Aujourd’hui encore, les pendaisons publiques en Iran existent.

A la fois roman, journal intime et pamphlet, ce texte court dénonce la violence physique ou verbale que peuvent subir certaines femmes iraniennes.

Comment rester insensible face à une telle œuvre ? J’ai toujours préféré l’argumentation indirecte d’un roman à l’argumentation sans détour d’un essai. Le message passe bien ici sans tomber dans le pathos.

J’ai trouvé de nombreux points communs entre Mal de pierres et La Muette. Dans les deux livres, j’ai retrouvé ces femmes en marge de la société qui essaient tant bien que mal de vivre.

Commentaires sur Quel beau métier professeur !

Admirez la belle contrepèterie qui ouvre ce billet.

Dans cette partie, les morpions seront les stars. J’y mettrai aussi des bouquins (noooon, encooore !) portant sur la pédagogie. Mais il y aura surtout des anecdotes, hum.
Comme je suis en vacances, je vais devoir faire du réchauffé … mais je suis à peu près certaine que de nouvelles perles se glisseront dès la rentrée (avec les 6èmes, ça devrait donner.)

***

Cette année, je me suis rendue compte que j’étais déjà mère de plusieurs ados, et que j’en avais de la 6ème à la 3ème. Alors oui, en m’y prenant tôt (très tôt même), j’aurais pu avoir un enfant de 15 ans. Mais en avoir dix me paraît impossible (je ne suis pas une souris …). Force est de constater que ces enfants ne sont pas de moi.
Pourtant c’est bien moi qu’ils appellent maman.
Nous sommes au mois de juin, en pleine révision du brevet. Les élèves sont studieux en ont marre de faire pour la quinze millième fois des exercices de réécriture. Le moment de la correction arrive. La délivrance est proche.
Un grand lève la main et lâche :
-Je veux bien corriger, maman.
Le mot de trop.
Tout sourire je lui réponds :
– Mais voyons M*****, nous avions dit qu’il fallait éviter que tu m’appelles maman en classe.
Les autres mettent quelques secondes avant de réagir et voyant que je me prends au jeu, un élève lance :
– Ah mais tout s’explique ! C’est pour ça que tu es grand !
La classe  entière éclate de rire.
(Ndlr : je suis très grande)
Normalement cette blague s’arrête là.
Sauf que M****** s’est évertué à m’appeler Maman jusqu’à la fin de l’année. Et sur le p’tit mot de fin d’année, j’ai un joli : « Bonnes vacances, maman ! « 

***

De l’art de bien parler

Cette année, j’avais une classe de sportifs. Dans cette classe de 30, 15 gars aimant mieux manier le ballon que le stylo.
Pourtant l’émulation faisait rage. Habituellement, plus ils sont grands, moins ils parlent. Là c’était tout le contraire.
10 mains levées en permanence. Et jaloux comme pas permis ! Si j’avais interrogé une fois un élève, il valait mieux que je fasse le tour des doigts levés avant d’interroger de nouveau le premier.
Bref, que du bonheur. Alors oui, ils n’avaient pas de bonnes notes ; mais au moins ils étaient curieux d’apprendre.
Ainsi quand j’ai étudié le subjonctif imparfait avec eux, ils voulaient que je leur donne des exemples. Ils s’en fichaient que je dise que le subjonctif imparfait n’était plus utilisé à l’oral, ils voulaient des exemples.
Et à la fin du cours, dans le couloir, j’ai entendu :

– Hey ! Je voudrais bien que tu vinsses faire un foot ce soir ! 

Je les imaginais le soir chez eux, à table.

– Maman, j’aurais voulu que tu me passasses le sel.

(La même classe, un peu avant l’épisode du subjonctif …)

Il est toujours délicat d’écrire au tableau. Je ne les vois pas, et à moins de me greffer des yeux dans le dos, ce sera toujours le cas. Alors de temps en temps, si ce que j’écris est long, je me retourne. Histoire de les surveiller.
C’était le cas ce jour-là. Hop, petit tour de tête vers la gauche et là, dans le fond, une main levée, non pas pour me questionner, mais pour taper un autre élève. Au bout de cette main, une règle.
– Vous deux, à la fin de l’heure, vous v’nez me voir !
Tout penauds, tête baissée, ils viennent donc au bureau.
Ma curiosité l’emporte sur la colère et je demande à Juliette (nom d’emprunt car les élèves sont les stars de cette catégorie) pourquoi elle voulait taper Léo.
-Ben, il m’a traitée de sorcière pleutre.
– Hein ? Mais, comment connais-tu ce mot ? (J’en oublierais presque l’objet de ma question.)
– Ben, depuis qu’on l’a vu en cours avec vous, on se traite de pleutre. On aime bien.

Ces gosses m’étonneront toujours.

Commentaires sur Mal de pierres de Milena Agus


Ed. Liana Lévi, 124p, 13€

(En arrière-plan, les galets de Dieppe)

« Simplement elle était une créature que Dieu avait faite à un moment où Il n’avait pas envie des femmes habituelles en série, Il avait eu une inspiration poétique et Il l’avait créée … »

La narratrice, jeune femme qui s’apprête à se marier, revient sur l’histoire singulière de sa grand-mère sarde. 
Celle-ci s’est mariée sur le tard « à une époque où une femme pas encore casée à trente ans était déjà presque vieille fille ». Alors quand un homme la demande en mariage, ses parents acceptent volontiers cette requête ! Peu importe si elle ne l’aime pas. Il faut bien qu’elle se trouve un homme tout de même ! Après le mariage, les jours s’écoulent et une relation chaste voit le jour entre le mari et la femme. De son côté, il faut bien qu’il décharge son trop plein de désir, alors il se rend régulièrement dans des maisons closes.
Pourtant un soir, le voyant fumer la pipe, elle lui dit :
« Il ne faut plus que vous dépensiez de l’argent pour les femmes de la maison close. Cet argent vous devez le dépenser pour acheter votre tabac et vous détendre en fumant votre pipe. Expliquez-moi ce qui se passe avec ces femmes et je ferai exactement pareil. »
Etrange lien tout de même entre ce mari et cette femme. Même si elle ne l’aime pas, elle souhaite lui faire plaisir … Alors de temps en temps, elle accepte de jouer le rôle d’une femme de maison close.

L’enfant est comme le mari : il tarde à venir. Tomber enceinte n’est pas un problème. Mais la vie ne semble pas vouloir grandir en elle. A cause de son mal de pierres (des calculs rénaux),  les grossesses n’arrivent jamais à terme.
Une cure changera tout pour elle.
Un petit naîtra sitôt la cure terminée ; mais surtout elle fera la connaissance du Rescapé. Le grand amour de sa vie.

Difficile de raconter ce roman.
Déjà parce que la narration n’est pas linéaire, et la raconter chronologiquement enlève tout son piquant. Puis parce que deux points de vue se mêlent dans ce roman : celui de la grand-mère et celui de la petite fille.  Et finalement parce que la vérité n’est pas forcément celle que l’on croit.
A la manière d’un puzzle, pièce par pièce, et grâce à l’histoire des personnages secondaires, le lecteur comprend la véritable histoire de cette grand-mère.
« Dans chaque famille, il y a toujours quelqu’un qui paie son tribut pour que l’équilibre entre ordre et désordre soit respecté et que le monde ne s’arrête pas. »
Quand j’ai refermé le livre, je n’avais qu’une envie : le redécouvrir à la lumière de la fin ! En effet, tout n’est qu’une question de perspective. Voilà ce que semble dire ce court roman troublant.

Message édité : Je viens de lire sur Rfi que Nicole Garcia projette d’adapter ce roman au cinéma.

Commentaires sur Le cimetière marin de Varengeville

Dans L’Or du temps,  Alice Berthier fait découvrir le cimetière marin de Varengeville au narrateur. Voici ce coin de verdure (vous pourrez vous imprégner de l’atmosphère de ce roman …)

L’église


Les vues du cimetière


« L’arbre de Jessé », vitrail de Georges Braque


La maison d’Alice ?

Cliquez sur les images pour les agrandir.

Commentaires sur A Lundi !

Ce week-end, retour sur les plages normandes !
Au programme : faire mes réserves en air salin, regarder les vagues et les écouter. A lundi !


Découvrez Julien Doré!

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