Redonner la voix à ce film presque muet qu’a été le parcours de Nadia C. entre 1969 et 1990.
De Nadia Comaneci, Lola Lafon, tout juste 40 ans, ne peut avoir de vrais souvenirs, puisqu’elle était bien trop jeune au moment où la jeune athlète était au sommet de sa gloire. Pourtant, elle signe là bien plus qu’une biographie plate et sans saveurs. En lisant Le petite communiste qui ne souriait jamais, c’est toute la vie de Nadia Comaneci, pensées comprises, qui défile devant nous …
A mi-chemin entre le biopic souvent inintéressant (sauf pour les mordus) et le roman (trop éloigné de la réalité), l’auteur s’est documentée sur cette athlète en lisant notamment ses lettres, et a comblé les blancs existants.
S’ouvrent alors à nous toutes les pensées de cette jeune fille aux couettes.
Son travail acharné, sa relation avec Bela, son régime strict, ses blessures, ses joies, son moral d’acier, son envie de réussir et de se dépasser encore et toujours, mais aussi sa relation avec le gouvernement de Nicolae Ceaușescu …
Tout sonne vrai et juste. La narratrice semble avoir fait corps avec la jeune athlète, fouillant au plus profond de ce que la jeune roumaine a pu ressentir. Sans doute grâce aussi à certains procédés utilisés : le récit est émaillé d’échanges fictifs avec Nadia Comaneci qui démontrent à quel point l’athlète entretient le halo de mystère qui l’entoure encore aujourd’hui … échanges remplis de contradictions, d’envies de retirer des parties, de se confier sur d’autres, mais aussi d’affronter deux regards, ceux d’une femme de l’Est, l’autre de l’Ouest … le lecteur n’imagine que trop bien que ces échanges auraient pu vraiment exister.
En réalité, ce roman est bien plus que le récit fascinant de la jeunesse de Nadia Comaneci : véritable mythe roumain, machine de guerre d’un gouvernement mégalomane, tout y est disséqué. La jeune femme incarne alors une époque révolue où un petit pays a fait de la résistance à deux grandes puissances avant de devenir ubuesque.
En fait, le roman de Lola Lafon est à l’image de l’athlète : tout en équilibre, gracieux et fascinant. Le lecteur referme ce livre fasciné par un tel destin, mais aussi profondément attristé face à ce monde de complots, de comédies et de drames permanents au nom du pouvoir, qu’il soit personnel, mondial, voire interplanétaire.
Auteur : Lola Lafon
Genre : Romans et nouvelles – français
Editeur : Actes Sud, Arles, France
Prix : 21.00 €
272 pages
Date de sortie : 08/01/2014
GENCOD : 9782330027285
Le roman concourt pour le Prix Relay / Europe 1 ! Vous pouvez aller voter ici.
Clara : Subtile, vive, aérienne et maîtrisée, l’écriture explore à merveille toute la complexité et la fragilité du personnage dans son contexte.
Theoma : Incarné, maîtrisé, féroce. Un roman d’une piquante intelligence, bravo Lola Lafon !
Valérie est moins enthousiaste.