Hier matin, j’ai eu la chance de voir en avant-première le nouveau film de Laurent Cantet « Entre les murs » qui est l’adaptation du livre du même nom de François Bégaudeau. Un film sur les profs vu par des profs venus exprès faire la queue boulevard Poissonnière à Paris (Bon, on elle était facile, celle-là).
J’ai apprécié lire le livre, car le narrateur y a peint son quotidien dans un collège difficile, le tout sous couvert d’humour, fût-il grinçant.
Hormis la scène initiale, le spectateur se retrouve « entre les murs » du collège durant tout le film, en huis clos. Un an parmi les collégiens du collège Dolto à Paris. Tous les ingrédients sont réunis pour qu’une tragédie se mette en place. Mais elle n’aura pas lieu …
Nous suivons donc le quotidien de François Marin qui enseigne le français et qui est PP (professeur principal) d’une classe de 4ème. Entre rires et tensions, nous voici une petite souris dans une salle de classe.
Les adolescents sont à l’image de ceux que nous voyons en banlieue parisienne, et pour cause, les adolescents jouent leur propre rôle. Ce ne sont pas des acteurs professionnels, pourtant leur ton sonne juste.
Certains collègues qui ont déjà vu ce film se sont offusqués de l’image négative que renvoie ce prof. Il est en effet pas rare qu’il se fasse déborder, les élèves gardent chewing-gum et MP3 en cours, et une bagarre éclate même au sein de la classe.
Il est vrai que c’est difficile de ne pas juger ce prof quand on en est un. Moi non plus, je n’ai pas réussi à me détacher de mon métier. Bien souvent, je me disais que je n’aurais pas réagi de la même façon que François … mais chacun a sa façon d’enseigner après tout.
Que dirait un oeil extérieur ? Justement, j’attendais impatiemment l’avis de l’Homme sur ce film. Aussi me suis-je empressée de lui demander à la sortie comment il voyait ce prof. Sa réponse m’a réconfortée car il m’a dit qu’avec ce film, les gens se diraient que le contact entre le prof et les élèves n’était pas rompu, que ce François Marin étudiait le français sans le couper de la réalité.
Le message du film n’est dont pas si pessimiste que ça.
Oui, bien-sûr que certains se demanderont comment un prof fait pour tenir devant de tels élèves. D’ailleurs la salle des profs est montrée comme le sas de décompression après un cours musclé. De mon côté, je trouve que ce prof a réussi à maintenir un contact entre lui et ses élèves en les faisant beaucoup parler, et ce même si faire de l’oral est plus propice au débordement.
L’autorité ne passe pas exclusivement par les sanctions.
Par contre, je n’ai pas retrouvé la fraîcheur du livre. Cantet a choisi de mettre en avant les moments de doute d’un professeur, ses failles. Le prof est un homme comme les autres qui se laisse déborder de temps en temps.
J’attends maintenant la réaction des personnes qui ne font pas partie du milieu enseignant. Ma crainte est que le public prenne pour argent comptant ce film. Cantet et Bégaudeau ont beau répéter que ce film est une fiction, certains croiront qu’il est un miroir des salles de cours.
Pour moi le message du film est de montrer que professeurs et élèves peuvent cohabiter, ce qu’illustre la scène finale du film.
Entre rires et fatalité, ce film mêle plusieurs tons : il est à l’image du microcosme d’un collège.
« Chaque prof à sa méthode. Chaque méthode est la bonne « ,m’a dit quand j’ai débuté une collègue plus aguerrie. manière de dire que chacun doit tenir compte de sapersonnalité, qu’il n’y a pas de recettes toutes faites. reste à voir comme tu l’écris comment les non -enseignants vont prendre ce film.
Pas très envie de le voir. Je préférerais lire le livre je crois.
Oui, cela ne sert à rien de jouer un rôle … tôt ou tard, le naturel reviendra.
Tu avais lu le livre, Cathulu ?
BelleSahi : même s’il n’y a pas de scènes violentes, le spectateur est mitraillé de plans rapides et assez serrés … j’en suis sortie un peu sonnée.
Le livre ne m’avait pas fait cette impression. Mais je pense que Cantet a voulu accentuer la tension qui est déjà palpable dans le livre.
que j’aille le voir, j’avais déjà lu le livre, je te ferais part de mes impressions de non enseignante, promis !
J’avais bien aimé « être et avoir » dans un autre registre, ça me plaisait la classe unique, c’est comme ça que j’ai été élevée
J’attends avec impatience ton avis.
Bon, ce film est bien loin de la douceur de « Être et Avoir ».
Ce serait intéressant d’ailleurs de faire un film qui confronterait deux situations opposées. D’un côté les quartiers « chauds », de l’autre la verte vallée (qui est parfois chaude aussi.)
Assez d’accord avec cette appréciation.
J’ai vu moi aussi le film en avant première et l’ai commenté sur mon blog
La force du film pour moi est dans la vérité humaine des personnes, des ados mais du prof aussi avec ses contradictions et ses incohérences . Dans l’énergie très positive que le film dégage et dans le fait que malgré tout quelquechose passe entre enseignants et ados.
Mais son danger est qu’il soit perçu comme un documentaire, comme « un miroir des salles de cours » comme il est bien dit ici. Ce qu’il n’est pas mais il est un peu difficile de ne pas le percevoir comme tel, ça a été la réaction un peu choquée des ados qui étaient présents à la projection où j’étais: « on est d’un collège difficile mais ça ne se passe pas comme ça dans notre classe, le film donne une mauvaise image ».
Surtout que les adolescents sont très sensibles à l’image qu’on leur donne. Il ne faudrait pas que ce film les stigmatise encore plus. Oui, ils sont dans un collège difficile, mais le travail reste tout de même possible en ZEP.
(Valclair, je n’ai pas pu aller sur ton blog, l’adresse est incomplète.)
je ne connais pas le livre ..ni le microcosme d’une salle de classe…mais je suis sure que les profs font ce qu’ils peuvent dans des zones dites sensibles…et si le dialogue reste ouvert c’est une chose primordiale à une epoque où me semble t il les ados communiquent peu avec l’adulte.
j’ai bien envie d’aller le voir
Certains critiques disent que ce film montre une école ouverte et sensible au monde moderne. Si le public retient ce message, ce sera bien.
Les avis sont vraiment partagés. Certains se focalisent sur le manque de réaction de François Marin, d’autres sur son ouverture d’esprit …
J’attends de lire ton avis.
je sais pas si j’irai le voir. En général, j’aime pas trop les livres et les films sur les profs car je trouve qu’ils ne correspondent pas toujours à la réalité et j’aime bien penser à autre chose pendant mon temps libre.
Oui, je dois être un petit peu maso sur les bords pour passer mon dimanche matin à regarder un film sur un prof de français.
Mais ça m’intéresse tout de même de savoir comment l’enseignement est perçu de nos jours.
Je n’irai pas voir le film car, déjà, le livre m’avait déçue. Je n’y avais trouvé que des instantanés « recopiés » (l’auteur explique d’ailleurs qu’il prenait des notes chez lui le soir après sa journée) du quotidien, une espèce de reportage pris sur le vif, point (et j’avais trouvé le constat globalement assez amer, au-delà d’un humour de façade).
Dans ce sens, Leil, cela ne m’étonnerait pas qu’il puisse y avoir confusion entre le film et la réalité : à mon sens, cette confusion existait (et était assumée comme telle) dans le livre. Le film interprète le livre, mais le spectateur risque d’avoir du mal à faire la part des choses.
Je n’irai pas, pour les raisons que tu énonces un peu : c’est forcément une vision du métier partiale et personnelle (car s’il y a bien un métier que nous pratiquons tous différemment, c’est bien celui-ci). Sinon, tu dis dans un commentaire que le travail est possible, même en ZEP. Hum. L’année dernière j’ai enseigné dans le pire établissement de Paris. Je peux te dire que le travail n’y est pas possible, pour tout un tas de raisons (certes, c’est un cas rare et extrême, thank goodness).
Je pense que je verrai ce film, en DVD, donc pas tout de suite, mais j’ai lu le livre, plutôt aimé, et vu François Bégaudeau en « rencontre » dans ma ville, il était très agréable à écouter, je suis ravie de ce qui lui arrive…
Plus je lis les critiques, plus je me dis qu’effectivement le film est considéré comme un documentaire … c’est vrai qu’ils entretiennent la confusion aussi. Comme dans le livre, le professeur s’appelle François. Il n’y a que le nom qui change. L’ambiguïté a donc été gardée. Ils auront beau dire que le film est « librement inspiré du film », le public n’y verra qu’un doc’.
Bienvenue sur le blog !
Oui, nous pratiquons tous ce métier à notre sauce. Quant au travail en ZEP, seul le professeur qui est déjà connu des élèves peut espérer instaurer l’idée du travail. C’est difficile tout de même …
Le système est très mal fait, ce sont très souvent des néo-titulaires qui sont chargés d’aller dans les quartiers chauds.
Oui, le DVD n’enlèvera rien au film.
D’ailleurs j’ai lu aujourd’hui que Bégaudeau sortait un « Antimanuel de littérature ». Le titre m’intrigue … j’y jetterai bien un coup d’œil.
A lire toutes les critiques, les « je n’irai pas », les « j’irai », je me dis que ça vaut le coup que je me déplace.
Je vais peut être prévoir un convoi de non profs, on rassemblera nos idées en patchwork.
Hum. Je suis vieille tu sais. Il y a bien longtemps que je ne suis plus néo-tit. ))))
Oui, j’avais lu le livre et bien qu’ayant beaucoup d’ apriori, je l’ai bien aimé.
Lolo : Le film fait aussi débat en salle des profs ou sur les différents fora.
Fashion : Oui, c’était une généralité que j’énonçais. Plein de paramètres entrent en jeu. Si l’académie est chère, si ton poste a été supprimé, si tu es TZR … développer tous les cas de figure serait bien trop long. :/
J’ai un poste fixe en région parisienne, mais je ne suis pas en ZEP …
Cathulu : tu comptes aller voir ce film ?
je crois que je vais d’abord decouvrir le livre avant d’aller voir le film.
Le livre se lit très vite, ça te permettra de te faire une idée avant d’aller au ciné.
Bienvenue sur le blog !
Bon, je ne résiste pas à donner le lien de notre critique du film. Chantée pour que ce soit plus entrainant…
http://leszrofs.blogspot.com
En tout cas c’est un film tout à fait cohérent avec le reste de la filmographie de Cantet ; pour l’apaisement final (la partie de foot), on sent que ce n’est qu’une trêve, je pense qu’il montre plutôt l’alternance de tensions et d’apaisements qui font une année scolaire…
Oui, ce n’est qu’une trêve qui durera le temps des grandes vacances. Un éternel combat.
Mais le film est un peu plus léger grâce à cette note là. S’il s’était terminé par cette élève qui avoue qu’elle n’a rien compris de toute l’année, le message n’aurait pas été le même. :/
Bonjour,
je n’ai pas du tout aimé le livre, comme je l’ai d’ailleurs écrit sur mon blog )
http://lectiole.canalblog.com/archives/2009/07/04/14295270.html#comments
En revanche, j’avais lu avec intérêt, il y a quelques années, le Journal d’un prof de banlieue de Jean-François Mondot, où un jeune professeur stagiaire d’histoire-géographie fait part de ses difficultés et de sa découverte du métier, au jour le jour.
Ah je ne le connais pas celui-ci, je note !