Quand en janvier 1945, les Allemands prirent peur de l’avancée des chars soviétiques, des camps furent abandonnés. Après des années de captivité et de soumission, les détenus de ces camps étaient enfin libres !
Libres de sortir, de passer de l’autre côté de cette barrière, de franchir ces barbelés qui étaient pour ces détenus leur seule ligne d’horizon.
Libres de bouger comme bon leur semblait !
Au début, ils n’osèrent pas. Ils n’y croyaient pas vraiment. Cela s’était passé si vite ! Peut-être était-ce un piège des Allemands eux-mêmes ? Peut-être était-ce une machination pour leur donner une fausse joie ? Mais non. Il fallait bien se rendre à l’évidence : ils étaient bien partis.
Les détenus de ce récit font partie d’un camp de travailleurs. Même si les conditions de vie n’ont rien d’idyllique, leur sort n’est pas comparable aux détenus des camps polonais. Ici en Slovaquie, les détenus ne sont pas devenus des fantômes vivants.
En fait, ce camp était à l’origine un bordel. Des femmes blondes aux yeux bleus, de type aryen donc, qui avaient sauvé leur peau en échange de leur enveloppe charnelle y avaient été amenées. Puis, avec le temps, une usine de cercueils avait vu le jour, et avec elle des travailleurs.
Ces hommes et ces femmes viennent donc tout juste de goûter à la liberté. Certains enfants nés en captivité ne savent même pas quelle herbe pousse derrière les barrières du camp.
Une fois la surprise passée, les détenus osent mettre un pied en dehors. Mais très vite, les voici confrontés à un problème de taille : les Allemands ont miné le pont, unique échappatoire.
Alors, ces hommes qui pensaient être libres sont obligés de rester dans ce camp. Dans cette enclave.
Une vie sans geôliers va commencer.
Ils doivent s’organiser le plus vite possible s’ils ne veulent pas mourir : trouver un chef, de la nourriture, se chauffer …
Déjà des figures fortes jaillissent : Dansko paraît être le meilleur pour devenir leur commandant.
Mais comment éviter les débordements ? Ces hommes si longtemps avilis peuvent-ils suivre un nouveau chef ? Et ce meneur réussira-t-il à sauver ce petit groupe ? Dankso est-il vraiment le meilleur dans ce rôle ?
Voici un roman découpé en cinq chapitres, qui durent chacun une journée, comme plusieurs petites tragédies dont les écrous se mettraient en place un à un .
Même s’il s’agit de l’après libération d’un camp, ces hommes luttent toujours pour survivre. C’est donc un microcosme qui se met très vite en place : comme dans n’importe quelle société, un chef est désigné, puis des conseillers. A eux de gérer le camp. Il est intéressant de voir comment chacun tente de prendre ses marques dans ce système provisoire, voire de s’imposer.
C’est Matthias un jeune adolescent, dit Eide -le lézard-, qui nous raconte cette histoire. C’est lui le scribe qui retrace les différentes journées. Le lecteur suivra donc ses pensées tout au long du livre.
Ce camp, cette enclave plutôt, a tout des Enfers antiques : c’est un lieu clos, où règnent certaines tentations comme la nourriture qu’on ne doit pas toucher trop avidement sous peine de voir son estomac éclater. Ainsi, les anciens détenus sont un peu comme le supplicié Tantale qui ne pouvait ni manger ni boire. C’est un lieu cerné par des montagnes et un tunnel, comme l’entrée de Enfers, un lieu où un fleuve infranchissable coule. Fleuve qui pourrait rappeler le Styx, mais sans le passeur Charon malheureusement. Et aux frontières de ce lieu infernal, un animal dont les griffes et les crocs déchiquètent tout sur son passage : un Cerbère des temps modernes.
Il reste tout de même à savoir si, une fois sortis de cette enclave, ces hommes auront droit aux Champs-Elysées (lieu de repos éternel pour les héros) ou au Tartare (lieu de damnation.)
Encore une fois, ce n’est pas un sujet léger. Mais il s’agit avant tout ici de voir ce que l’homme met en place pour survivre dans de telles conditions. Et c’est aussi un roman plein d’espoir puisque Matthias, un adolescent qui symbolise l’avenir, ne cesse de vouloir sortir de cet Enfer.
Ed. Plon, 313 pages, 20 €
Lu dans le cadre du Prix des Chroniques de la rentrée littéraire.
20 Minutes : Exploitant jalousies entre classes sociales, tensions raciales et
sexuelles au sein du camp, Dankso crée un mélange entre royaume féodal
et dictature totalitaire, hanté par la présence fantomatique des nazis,
restés dans le camp par le biais de leurs chats. En un roman qui se lit
d’une traite, Carrese nous interroge sur le despotisme. Et, surtout,
sur la responsabilité des hommes libres qui, par lâcheté,
méconnaissance ou épuisement, le laissent prospérer.
Le Figaro : Un récit palpitant d’une aventure hors norme, écrit avec la simplicité et la délicatesse qu’impose le maniement de la dynamite.
Voilà un roman qui me plaira sans aucun doute !
Tu ne fais pas dans le léger en ce moment ! En tout cas le thème est intéressant, je le note pour plus tard.
Comme tu le sais, je l’ai déjà lu. Ton billet est très chouette et retransmet bien l’ambiance du livre.
Je vais attendre un peu avant de le lire! Sujet trop lourd pour moi en ce moment!
@ Moka :
Un roman intéressant car ce thème n’est pas souvent exploité.
@ Aifelle :
Non, et d’ailleurs j’ai envie de lire des histoires légères !
@ Stéphie :
Merci ! Si l’ambiance est recréée, alors c’est le principal !
@ Mango :
Quand je l’ai commencé, je me suis dit « allez, encore un sujet sombre ! » Malgré tout, je n’ai pas peiné pour le lire.
Un beau sujet mais j’attends un peu aussi
u sujet certes sombre mais qui doit être prenant.. tu en parles fort bien !
Un livre, un thème et un billet qui m’intéressent beaucoup!! je le note! merci
Le sujet me rappelle La trêve de Primo Levi, épopée d’un groupe d’italiens qui, sortis des camps nazis, peinent à retourner en Italie.
Il est vrai qu’il existe très peu de livres sur l’après-libération des camps.
Kathel : j’ai lu « La Trêve » et c’est très différent. Car là même s’ils ne sont plus prisonniers, ils sont tout de même « coincés » dans leur camp et vont devoir s’organiser.
Je ne sais pas si je survivrai à tous ces romans de guerre qui abondent en ce moment.
Je le lirai sans doute mais pas tout de suite, j’en ai encore d’autres à lire avant et j’ai peur de saturer à force :/
tiens je l’ai vu à la biblio tout à l’heure… Mais je n’en peux plus des camps et de la guerre !
Un beau livre sans doute… Mais en ce moment je n’ai pas envie de me lancer dans une lecture aussi sombre. Je préfère garder ce titre pour un peu plus tard…
L’axe de cette histoire es très intéressant, porteur de nombreux thématiques, problématiques en germe…
Première fois que j’entends parler de ce livre. La dimension psychologique a l’air très intéressante, je le note.
Merci pour ton très bel article sur ce sujet si douloureux. Je le lirai, mais plus tard …
C’est tout à fait le genre de romans qui m’intéresse et que j’aime lire, Leiloona … Mais je vais le garder pour plus tard, quand les beaux jours seront revenus, que le soleil sera là ! En ce moment, je trouve des livres-là assez difficiles à lire !
@ Mirontaine :
Un très beau sujet, oui.
@ Yueyin :
Merci ! Oui, ce n’est pas un sujet léger, mais après tout dépend de son traitement.
@ lancellau :
J’espère que tu aimeras.
@ kathel :
Je ne connais pas ce livre de Lévi. A noter, justement pour comparer.
@ Alex :
Oui. Après être sorti d’un camp, je suppose qu’on préfère l’oublier. Et puis, écrire l’indicible est tout de même particulier. D’ailleurs, si tu regardes bien, ici, ce n’est pas non plus un camp de la mort.
@ Stéphie :
Merci pour ce complément d’informations !
@ Cynthia :
C’est vrai qu’il y a en a énormément. Le temps de latence pour en parler ?
@ Papillon :
Je te comprends : mois aussi en ce moment, j’ai envie de livres plus légers.
@ Marie :
Peut-être avec le retour du printemps ?
@ Sabbio :
Exactement. C’est un sujet inépuisable !
@ Choco :
Pour étudier les comportements des différents protagonistes, oui, tout à fait !
@ Sybilline :
Merci à toi.
Ohlala ça ne doit pas être un roman facile que celui-ci !
Le sujet n’est pas facile, mais comme il s’agit de l’après libération, une grande menace s’est tout de même affaiblie.
Encore un titre de la rentrée qui me tente beaucoup. Mais, pour lire tout ce qui me tente en ce moment, il faudrait que je me transforme en machine à lire, et assurément, je n’y arrive pas!!