Après avoir lu Freedom de Franzen, j’ai eu peur de commencer Famille modèle. A peu près le même sujet et la même épaisseur : la « malédiction » allait-elle continuer ? Allais-je encore une fois me dire que tout ce qui touche aux Etats-Unis me déplaît ?
Néanmoins, j’avais lu de très belles critiques sur ce roman, il ne fallait pas que je reste sur un a priori négatif de la littérature américaine.
Dès les premières pages, j’ai compris que « la malédiction » ne continuerait pas. Enfin, j’allais pouvoir me délecter sur ce sujet sans bailler aux corneilles.
On peut trouver énormément de points convergents entre Freedom et Famille modèle. D’ailleurs il est fort intéressant de constater qu’il existe un courant littéraire américain qui rendrait compte, après l’american dream, d’une certaine american failure … Une Amérique du chaos, où aucun rêve ne peut aboutir, bouché par un horizon quelconque. Le ver serait déjà dans la pomme, tout serait joué d’avance.
La grande différence entre les deux romans vient évidemment de la forme. Là où Franzen se borne à une description des faits, Puchner y insère de l’humour, donnant un certain allant à cette histoire. Ironie tragique, humour grinçant, cette tragi-comédie, elle aussi un véritable portrait au vitriol de l’Amérique actuelle, saisira aussi le lecteur par son intelligence.
Tout commence par un terrible mensonge : Warren qui a investi tout l’argent de la famille dans une affaire immobilière s’apprête à tout perdre. Mais il n’ose rien dire. Un mauvais investissement qui plongera la famille dans un marasme des plus profonds. Le lecteur rit aux dépens des personnages : quelle idée déjà de construire ce lotissement dans le désert ! Aussi quand Warren apprend qu’on déverse des déchats industriels à proximité de son lot de maisons bon marché, il est certain de voir tout son argent s’envoler …
La mère quant à elle réalise des documentaires d’éducation sexuelle. Habillée de façon ringarde, écolo sur les bords, elle ne cesse de faire des chèques pour des associations. Une mère qui se veut parfaite.
Et puis il y a les enfants. Dustin un beau gosse plein de charme qui aime avant tout la musique. Il joue dans un groupe au nom changeant, et s’apprête à aller à l’université. Enfin, si son père en a les moyens … La fille, Lyle, l’adolescente rebelle ne s’est pas bien adaptée au soleil californien, pour faire passer le temps elle fait son éducation sexuelle, non pas avec les films de sa mère, mais avec Hector, un latino bien plus vieux qu’elle qui lui fait parfois honte …
Quant au petit dernier, personne ne le comprend. « Bizarre » serait un bon qualificatif. Surtout quand il s’habille en orange de la tête aux pieds.
Il ne manque plus que le chien. Un personnage à part entière. Voué à mourir d’ici peu, il incarne à lui seul la future déchéance de la famille.
Voilà le portrait de cette famille pas si modèle que ça. Mais aux Etats-Unis, l’apparence est reine, aussi il convient d’être avant tout le plus lisse possible.
On se doute bien qu’un jour ou l’autre une déflagration aura lieu.
Même si elle n’arrivera pas par un chemin attendu.
Si la première partie du livre ressemble à une comédie aigre-douce, le roman prend un virage à 180 ° dans la deuxième partie de l’histoire. Tout en gardant les mêmes ingrédients savoureux de la première partie, le récit va plus loin, et on se demande quand s’arrêtera cette chute.
Caustique, drôle, grinçant : Puchner arrive à nous peindre une famille américaine brisée tout en gardant un ton résolument drôle et touchant. On les iames tous, avec leurs défauts. Et malgré la situation complètement desespéré, le lecteur est tenté de croire que ces personnages pourront se relever. Car à travers leurs faiblesses, leurs mensonges et leurs fautes, ils n’en restent pas moins très proches de nous. Alors on espère, tout comme eux, qu’un jour l’arc-en-ciel reviendra.
Auteur : Puchner, Eric
Editeur : Albin Michel
Date de parution : 14/08/2011
EAN13 : 9782226229786
Genre : LITTÉRATURE ANGLO-SAXONNE
Nombre de page(s) : 522
24 €
25 /7
Qu’en disent les autres ? :
C’est un coup de coeur pour Clara, Keisha l’a lu et a eu son lot d’émotions, Hérisson nous parle d’un livre à l’humour touchant et saisissant. Antigone écrit que c’est une elcture brillante, très bien menée.
La presse est aussi dithyrambique :
« Puchner oscille entre drame et comédie. On pense à John Updike ou à Tom Perrotta… Il laisse entrer dans son talentueux premier roman une certaine étrangeté à la fois bienvenue et prometteuse. » Alexandre Fillon, Livres Hebdo
« Enfouie sous des strates d’humour grinçant, la sensibilité d’un auteur aux sentiments humains. » Clara Georges, Le Monde des livres
« Franzen vient de se trouver un authentique rival… Puchner fait une entrée fracassante dans l’univers des grands écrivains américains : son premier – et imposant – roman n’est rien moins qu’un rude chef-d’œuvre qui laisse le lecteur en état de choc. Portrait de famille en désintégration, mais aussi vivisection de l’Amérique, son pavé est l’un des plus grands romans anglo-saxons de ces dernières années. » Nicolas Ungemuth, Le Figaro Magazine
« Un roman caustique comme on les aime, qui oscille entre le burlesque et le tragique. » Marie-Laure Turoche (Librairie L’Ecriture, Vaucresson) Page
« L’équation : Desperate Housewives + Little Miss Sunshine = Famille modèle… Entre humour et désespérance, un roman cruel et saisissant. » Clémentine Goldszal, Elle
« Le récit commence comme une chronique classique style Américan graffiti, hyper-réaliste et drôle, puis se teinte de subtils décrochages, pour aboutir à des scènes de genre inattendues, des morceaux de bravoure dramatiques… Tordu et mordant. » Philippe Chevilley, Les Echos
« Dialogues incisifs plus vrais que nature, caustique, brillant… C’est beau, généreux, intelligent et écrit en virtuose par un surdoué. »Jean-Rémi Barland, La Provence
« Un talent de conteur incroyable… Pendant plus de 500 pages, on ne lâche pas cette tribu azimutée qui ne cesse de surfer entre désespoir et causticité. Une grande réussite. » L’Alsace
« Si Puchner en avait fait un film, on parlerait de « comédie familiale déjantée ». Et ce serait réducteur eu égard à son talent… dialogues acérés, sens de la scène à faire et du détail qui tue… Famille modèle est la révélation d’un romancier percutant. » Richard Sourgnes, Le Républicain lorrain
« Le formidable récit d’un fiasco familial, caustique, brillant et prenant… Une merveille. » Lucie Cauwe, Le Soir (Belgique)
« Alternant humour et désespoir avec une aisance surprenante, un roman à la construction parfaite, tout en finesse psychologique, où tous les personnages sont crédibles, habités, touchants. » Bruno Corty, Le Figaro littéraire
« Particulièrement doué pour passer du loufoque au drame, Puchner continue ici son travail de sape. A côté du dialogue virtuose, de la chronique hyperréaliste, il se montre plus rugueux, elliptique et original dans sa manière de désintégrer les clichés de la famille idéale et de la société de consommation. » Christine Ferniot, Télérama
« Famille modèle confirme tout le bien qu’on pensait d’Eric Puchner, le Jonathan Coe américain. » Didier Jacob, Coup de cœur du Nouvel Observateur
« Un roman audacieux, à la fois critique sociale et vibrante chronique familiale. Un vrai roman américain. » La Croix
LA PRESSE AMÉRICAINE
« Lire Famille Modèle, c’est assister fasciné à la chute et au démantèlement d’une famille ordinaire, grâce à une écriture saisissante et à l’accumulation de scènes mémorables. » The San Francisco Chronicle
« Un premier roman déchirant. Avec une attention méticuleuse, Puchner trouve une certaine beauté dans cette solitude qui sépare les membres d’une même famille. » Publishers Weekly
« Ce qui impressionne le plus, c’est cette capacité que possède Eric Puchner à rendre crédibles tous ses personnages, même quand il passe de l’un à l’autre. » ELLE
« C’est l’idée même de la famille qui se dévoile dans ce roman au style élégant et maitrisé. » The Los Angeles Times
« Eric Puchner est un écrivain extraordinairement talentueux. C’est un maitre de l’ambiance et du ton. » The Boston Globe
« La conclusion s’impose : Eric Puchner possède un talent colossal. » McSweeney’s
Moi je l’ai découvert grâce à CUné. Il faut que je le lise d’ailleurs
Tu me tentes vraiment avec ce livre. J’avais achete Freedom, mais je n’ai pas envie de le lire pour le moment on en parle trop .
J’aime ce genre d’histoire, je vais le noter sur ma wish list de Noel
J’ai Freedom dans ma PAL, mais pas encore Famille modèle. Après ton article, je ne peux qu’y remédier rapidement. Merci
Celui-ci est repéré (aussi n’ai-je lu que le début de ton billet,qui confirme ce repérage, j’y reviendrai plus tard, lorsque j’aurai découvert le roman) !
Très jolie critique ! Le sujet m’inspire peu mais tu en parles très bien.
« American failure »…très bien trouvé !!! Ca me tente drôlement, ce bouquin.
J’ai très envie de le lire aussi, j’ai aimé Freedom aussi…
Une fois de plus, on aurait pu faire « lecture commune » : mon billet sur ce roman est tout frais d’aujourd’hui! Tu résumes très bien les choses et la comparaison avec Freedom m’est également venue à l’esprit.
Déjà qu’il me tentait…
Ce livre est dans ma PAL… à côté de « Freedom »… sont gros… (mais euh… j’en lis un en ce moment de 1300 pages, faut être cinglée !).
J’ai lu comme toi péniblement Freedom et le livre suivant était Famille modèle… Même réaction, le livre se lit facilement, le style est fluide, le ton enjoué et la famille est attachante !
Il me tenterait plus que Freedom, a priori !
Effectivement, l’Amérique semble panser ses plaies dans sa littérature, c’est flagrant dans ce livre-ci… Mais une famille attachante qu’il fait bon suivre et un roman que j’ai vraiment aimé lire.
Dans notre groupe de lecture, Freedom n’a été lu que par l’une d’entre nous qui a laissé tomber au bout de 100 pages, alors elle hésitait pour celui là.. je lui dirais de tenter….
C’est pourquoi j’aime tant la littérature américaine : ils sont très auto-critiques envers leur société.
J’ai déjà noté ce roman.
J’ai aussi déjà noté ce roman. Ton avis m’incite encore plus à l’acheter
J’aime ta façon d’en parler… et j’aime cette rétrospective des avis, bravo pour le travail
Encore un avis positif sur ce roman, décidément il faut que je le lise.
@ Ys : Leur tranche est aussi épaisse l’une que l’autre, mais pour l’un j’ai mis plus de 15 jours, pour l’autre seulement 4 (bon, ok, j’étais en vacances, mais « Famille modèle » se lit bien plus vite que « Freedom ».)
Au moins je ne m’endormais pas au bout de 5 pages !
@ Manu :
Oui, c’est vrai ! Mais on a aussi pas mal de littérature de l’Est très autocritique aussi ! Mais l’humour n’est pas le même. plus déjanté à l’Est qu’à l’Ouest !
Et sinon ravie de vous inciter à lire ce libre, il vaut vraiment vraiment le coup !
@ Gwenaëlle : Décidément !
Notre cerveau est connecté sur les mêmes ondes pour la littérature américaine !
Ce roman t’a séduite malgré toutes tes appréhensions. Alors je note le titre !!!
Je n’avais pas du tout entendu parler de ce livre, mais j’aime beaucoup d’autres qui traitent aussi de ce sujet, notamment ceux de Laura Kasischke … je crois que je vais vite me noter le titre ..
Bises !
Tout récemment, Gwenaëlle s’est montrée aussi enthousiaste que toi :http://skriban.wordpress.com/2011/11/17/famille-modele/
Je le veux !
DEux bons romans à lire coup sur coup, alors.
J’ai lu Freedom après celui ci , (j’ai aimé freedom, bon, on n’est pas nombreux mais je n’en ai pas honte!)mais cependant Famille modèle coule plus vite, c’est un excellent roman qui à la fois fait rire et prend aux tripes!
Claudialucia a fait voyager cette famille modèle et j’ai lu ce livre avec beaucoup de gourmandise et de hâte. Ton billet reflète très bien mon avis sur les apparences extérieures et les failles intérieures.
J’aime aussi « on se doute bien qu’une déflagration aura lieu », bien vu!
(J’ai lu ce livre à une période où je ne rédigeais pas ou peu de billets).
Il vient d’attérir sur ma PAL et je me réjouis de le lire !