C’est pour la côte bretonne, du côté de Dinard que Claire quitte tout un jour. Sa vie d’avant, le bruit de la ville. Elle s’installe alors dans une petite bicoque prêtée par son ancienne professeur de piano. Là, parmi ces pierres de granit, les cheveux séchés et emmêlés par le vent salé, elle renoue avec son enfance.
De ses parents, il ne reste rien. Ou plutôt, il reste l’absence. Un accident de voiture provoqué par un homme triste de comprendre que sa femme le quitte ; une femme qui se tue pour avoir été la cause de ce premier suicide.
Un début de vie assez lourd pour Claire et son frère. Lui, il sera placé en pension, quant à elle, elle sera très vite accueillie par les parents de Simon dans leur boutique.
Les Solidarités mystérieuses est un roman sur les différentes osmoses qu’on peut croiser sur le chemin de notre vie.
C’est d’abord Simon pour Claire, cet homme maintenant marié et père, mais pour qui l’attirance ne s’est jamais vraiment démentie ; puis c’est la professeur de piano, même si l’attachement n’est pas le même ; enfin c’est le relation que la jeune femme possède avec son frère Paul. Même si les débuts ont été chaotiques, entre eux existe un joli lien indéfectible.
Outre ces différentes solidarités mystérieuses, une osmose particulière va naître entre Claire et la côte bretonne. C’est une femme d’extérieure qui se bat pour cette partie malmenée de la Bretagne.
Claire est une femme blessée mais terriblement forte, mue par une force qu’elle puise sans doute dans la relation qui l’unit à son frère. A deux, c’est toujours plus facile.
Ce n’était pas de l’amour, le sentiment qui régnait entre eux deux. Ce n’était pas non plus une espèce de pardon automatique. C’était une solidarité mystérieuse. C’était un lien sans origine dans la mesure où aucun prétexte, aucun événement, à aucun moment, ne l’avait décidé. Bien sûr ils avaient partagé des scènes cruelles, partagé des deuils, quand ils étaient enfants, ils avaient pleuré l’un à côté de l’autre, mais jamais un pacte n’avait été prémédité et conclu entre elle et lui.
Ce sont des personnages meurtris, malgré les différents liens qui les unissent ; et le style dépouillé, sans grande envolée lyrique, mime la sécheresse des sentiments. L’amour y est à l’état brut, jamais dit, juste ressenti.
Et le décor, fait de maisons de granit balayée par un fort vent salé, ne fait qu’accentuer cet état sauvage, ce dépouillement inexorable dans lequel s’est engagée Claire.
Petit à petit elle fera partie de ce paysage, devenant quasiment un fantôme sur cette côte.
Les solidarités mystérieuses, c’est aussi une multitude de narrateurs, un roman choral qui nous permet de connaître la réalité sous plusieurs angles. Le style change alors selon le narrateur choisi : ainsi les chapitres racontés par Paul sont-ils plus denses, les phrases plus longues, les sentiments à la surface ; au contraire de ceux racontés par Claire, presque des scripts.
De ce roman, le lecteur retiendra ce paysage offrant tout un camaieu de gris, mais aussi ces personnages solitaires malgré les nombreux liens indéfectibles que la vie leur a permis d’avoir.
Il y a dans ces solidarités mystérieuses une beauté triste et profonde qui s’échappe.
Auteur : Pascal Quignard
Editeur : Gallimard
Collection : Blanche
Date de parution : 06/10/2011
EAN13 : 9782070784790
Genre : LITTERATURE FRANCAISE ROMANS NOUVELLES
Nombre de page(s) : 251
18 € 50
Livre lu et chroniqué pour Merci à la librairie Dialogues pour cet envoi.
Clara : Une lecture riche et envoûtante. L’auteur nous ouvre les portes sur un univers sobre et puissant, simple et terriblement beau ! J’ai été très touchée et j’ai refermé ce roman avec un sentiment de sérénité profonde. Un moment rare de lecture !
Un livre merveilleux pour moi !
Je l’avais noté dans mon pense-bête et ta chronique me laisse à penser que ce roman peut me plaire. Je le lirais dès que possible
une pure merveille, un des meilleurs livres que j’ai lus en 2011 !
Je trouve ta présentation très belle … mais je ne pense pas le lire de sitôt, à moins de tomber dessus à la bibliothèque.
Bonne journée !
J’y viendrai certainement, à ces solidarités mystérieuses…
j’ai découvert Quignard cette année pour le boulot, j’ai aimé… Et ej l’ai entendu parler de ce roman à la télé, dans la Grande Librairie , je crois, il m’avait beaucoup touchée….
Une collègue m’en a parlé la semaine dernière et je ne connaissais même pas l’auteur. J’ai bien envie de le découvrir…
Un roman qui pourrait bien me plaire !
Tu en parles de bien belle manière mais ce genre de romans ne m’attire décidément pas.
Très beau billet J’aime bien Quignard, je le lirai à l’occasion !
j’ai un exécrable souvenir (bon, de jeunesse) de son prix Goncourt… Les Ombres errantes.
Un roman au propos optimiste, malgré le ton gris que tu décris.
J’ai très très envie de lire ce roman de Quignard dont je suis totalement fan !
PS : si tu viens de découvrir L. Kasischke, tu peux te lancer sans hésiter dans toute son oeuvre… Ses romans sont TOUS bons (il n’y a que le dernier que je n’ai pas lu…). Bon we !
Ce livre a l’air sublime et tu en parles avec beaucoup de poésie…
Merci, grâce à ce billet, j’ai passé un super moment de lecture.