Commentaires sur Les tribulations d’une laissée pour compte

Le lien vers la galerie de Kot !

 

Au petit matin, je me suis retrouvée là. J’ai ouvert les yeux sur un cadavre de mauvaise bière et le reste d’un sandwich sous vide. Sur ma droite gisait une brique de lait caillé. L’odeur venait jusqu’à moi. Nauséabonde, entêtante. 
La journée commençait mal. 
J’avais froid, je ne sentais plus mon corps, j’étais comme vidée de l’intérieur. Sur moi, des tâches sombres, des blessures que je ne me rappelais pas avoir subies un jour. 
Que m’était-il arrivé ? 
Je ne connaissais pas ce quartier : il faut dire que cela ne faisait pas longtemps que j’étais arrivée en France. Il y a encore une semaine, j’étais en Martinique, à Sainte-Marie. Le soleil me léchait le visage, je m’épanouissais sous cette lumière, grandissais même à vue d’oeil. 
Puis, il avait fallu prendre le bateau, pour la Métropole. Mes amies en parlaient avec appréhension. Ce ne sera jamais plus la même vie, selon elles. 
Le voyage en bateau fut impressionnant. jamais je n’avais vu une aussi grande étendue d’eau. Chaque jour nous éloignait un peu plus des Antilles. Petit à petit, la température avait baissé, la couleur du ciel s’était assombrie. 

Nous sommes arrivées à Dunkerque au petit matin. Et c’est avec le plus grand soin qu’on nous a débarquées, nous qui apportions un peu de soleil dans cette contrée sans lumière. Le froid nous a toutes saisies, nous nous sommes serrées les unes contre les autres. 
Alors c’était ça la Métropole ? 
Il a fallu dire au revoir à des copines, certaines partaient pour la Belgique, d’autres pour l’Allemagne. Nous, nous montions directement à la Capitale ! 
Le reste est assez flou. Arrivée sur Paris, j’ai été assez rapidement séparée de mes amies. Le reste n’est qu’un trou noir. 

Et me voici, là, au petit matin, grelottant de froid, meurtrie au plus profond de mon être. 
Les rares passants ne s’arrêtent pas, c’est à peine s’ils me distinguent dans la pénombre. 
Vais-je finir au milieu de ces déchets ? 
Et puis, pourquoi ai-je ces espèces de gommettes sur l’ensemble de mon corps ? Qui les a mises sur moi ? Un plaisantin ? La blague est plus que douteuse …
Une petite torsion de la tête pour lire un de ces autocollants ! Même si la douleur est atroce ! Mais pourquoi ai-je l’impression d’être un corps sans vie et atrocement mou ? 
Allez, un ultime effort, et j’arriverai à le lire. 

Sur son dos, on pouvait lire :

Origine qualité martinique, banane française.

 ©Leiloona

 

Et voici les liens vers vos textes : 

– Lilou : Tourisme

Jean Philippe 

–  Insatiable Charlotte

– Olivia  : Je ne sais pas encore 

Mathylde

Aurore : Fugue

Jean-Charles : La dernière marche

Lola Valérie : 78 marches vers … 

Miss So : Un escalier pour Miss So

Soène : Have another cup

Et les textes des « sans blog fixe » ! 🙂

(Bienvenue Roselyne !)

Gaëlle : 

 

La vie est faite de ces barrières que l’on se crée ou que l’on nous impose, celles de la culture, celles de l’éducation, celles de nos choix personnels. Ces barrières que l’on peut choisir de laisser fermées pour se protéger de tout et de tous, ces barrières que l’on décide d’ouvrir pour laisser entrer un peu de lumière. Ces barrières modulables pour y définir notre espace, celui qui tend au mieux vers notre définition du bonheur. Aujourd’hui j’ai fermé à clef la porte qui me ramenait à mon passé, puis j’ai jeté la clef dans la Seine. Il faut accepter de ne pas pouvoir changer le passé, les mauvais moments, comme les bons, car tous sont aujourd’hui autant immuables qu’obsolètes. J’ai rassemblé mes deux, trois affaires pour vivre un moment de liberté. Le mien. Assise au pied de l’escalier avec mon croissant, sur une table improvisée, je savoure l’instant. Vivre est aussi un choix : celui de se dire que peu importe où cet escalier mène, faire le pari qu’il y aura encore du beau. De bons moments, de belles personnes, de belles surprises. Vivre, c’est se laisser surprendre sans vouloir tout contrôler. Vivre, c’est prendre des risques. Le risque de souffrir encore, peut-être pour apprécier davantage la chance de vous rencontrer.

 Un petit déjeuner en tête à tête avec moi-même, et avec tous ceux qui auront décidé de s’arrêter pour un moment de partage de quelques minutes à toute une vie.


Roselyne : 

Tu étais à cet endroit, assis sur ce sol sale, à boire tes bières et à faire la manche. Je t’ai regardé, tu m’as souri et m’a demandé : « Mademoiselle, une petite pièce ? ». Je me suis arrêtée et je t’ai alors répondu : « Non, mais si vous lâchez votre bière, vous aurez ce soir un endroit chaud pour dormir, ainsi qu’un bon repas. Je vous invite chez moi ». Pourquoi ai-je fait ça ? Sérieusement, je n’en ai aucune idée mais tu me faisais de la peine… On avait à peu près le même âge et, pourquoi tu aurais dû être dans la rue alors que moi j’avais de quoi manger et un toit sur la tête ? C’était un peu comme décision, comme invitation mais je l’ai fait. Je n’ai pas eu peur, même pas une seconde. Je t’ai hébergé… Et petit à petit, j’ai réussi à te remettre sur le droit chemin. Entre temps, cependant, je me suis attachée à toi. Comme toi… Sauf que tu voulais partir car tu étais en bonne voie. C’est vrai : Tu avais un travail, tu ne buvais plus et tu envisageais même d’arrêter le cigare, par la suite. Mais j’ai refusé. Je voulais que tu restes, tu me protégeais. Tu m’as dit, ce soir là : « Pourquoi ? »… J’ai tourné la tête et j’ai chuchoté… « Je t’aime, tu m’es devenu indispensable »… Tu m’as alors demandé plus fort : « Pourquoi ? ». Je t’ai regardé, je te l’ai dit. Tu m’as alors regardé comme si j’étais la 1ère… Et là, tu m’as dis : « Viens ». Nous avons été dehors et tu m’as emmenée juste à côté de là où on s’est parlés… Sur ces marches… On est restés debout, et là, tu m’as dit mot pour mot : « Moi aussi, je t’aime. Seulement, je ne sais pas si c’est une bonne idée, nous sommes différents »… Je t’ai pris le visage et je t’ai alors embrassé… C’est ainsi que notre histoire a commencé… On est restés ensemble jusqu’à aujourd’hui… Aujourd’hui, tu étais quelqu’un de bien, de très bien. On s’aimait, on vivait au jour le jour avec tout le nécessaire qu’il faut… Mais tu es mort. Mort. C’est ça la fin, non… Alors, je continuais à vivre notre histoire.

22 comments

  1. Alvi says:

    Excellent, je pense que tu as l’art et la manière de trouver les points de vue les plus improbables, j’adore! bonne journée!

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  2. lucie says:

    j’aime beaucoup ton texte je n’ai pas vu la chute venir !! désolée pas de participation pour moi ce lundi.

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  3. Jean-Charles says:

    @Leiloona Il semblerait que cette phot ait inspirée le même genre d’idée pas mal de monde.

    Mais quel déracinement bien difficile.

    @Gaelle : Un choix plein d’espérance !

    @Roselyne : Donner sa chance à quelqu’un et en tomber amoureuse. Y a que dans les livres qu’on voit ça !

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  4. Asphodèle says:

    Bravo Leiloo, tu parles très bien de ces déracinées venues du Sud (ou du froid) et qui croient que l’Europe est une terre promise ! Les r^ves qui roulent en bas des marches… Mais dis-moi, c’est quoi le petit entrefilet à la fin de ton texte sur la banane de Martinique (ou de Guadeloupe) ? T’es sponsorisée ? Désolée mais je n’ai pas eu le temps de finir mon texte (qui est commencé !). Bravo aux Sans blog également qui toutes les deux, dans un genre très différent ont une vue appropriée à l’image de l’escalier, selon qu’on monte ou qu’on le descende…

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  5. Leiloona says:

    @ Asphodèle :
    Meuuuuuuuh non, c’est la chute de la nouvelle, c’est une banane qui parle !

    J’ajoute ton lien, Miss SO !

    Et je file au lit. Je suis baaaaaaaalaaaaaaade !

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  6. Asphodèle says:

    Je n’y ai pas pensé une seconde ! Je pensais qu’elle était battue et les « gommettes » pouvaient être des brûlures de cigarette ou des pansements… J’étais loiiiin ! D’ailleurs je ne dois pas être la seule… C’est encore mieux que ce que j’ai dit ! Excellent même… (tu aurais mis la fin en caractères normaux, peut-être que j’aurais compris ? mdr…

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  7. Leiloona says:

    Je n’arrive plus à accéder aux blogs de Lilou et d’Aurore … Google me dit que le blog n’existe plus.

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  8. Soène says:

    Le premier a l’air de s’être évaporé !

    Je te disais donc que j’adore ton texte, jamais je n’aurais pensé à une banane !

    Idée géniale !

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