Donatien Alphonse François, Marquis de Sade est emprisonné à la Bastille. Derrière les barreaux, et entre un geôlier à l’esprit bien inférieur et une religieuse / prêtre dont il ne partage guère les idées, le Marquis se crée une femme fictive. Comme cet ami imaginaire de votre enfance …
Elle partage alors ses doutes, et ses réflexions, une amie double qui lui permet de ne pas devenir fou. Ou du moins plus fou qu’il n’est.
Femme à l’esprit assez retors qui ne se donne pas facilement, mi-Justine mi-Juliette, elle donne du fil à retordre à l’esprit de notre Marquis.
Allons-y franchement : le texte de Leleu, aussi bien tourné soit-il, n’est pas à mettre entre toutes les oreilles … Le foutre, l’étron, la sodomie font partie intégrante de ce spectacle. Et aux mots s’ajoutent les actes.
Le Marquis provoque, comme en son temps.
Néanmoins, à moins de penser que le Marquis fut une source pour l’écriture de Fifty Shades (et à ce moment-là, nous ne pouvons plus rien pour vous), les spectateurs connaissent un peu l’oeuvre de Sade, et ne seront pas non plus choqués par les mots et gestes du Marquis. Sade n’a rien d’un agneau et on ne peut que saluer cette volonté de ne pas édulcorer ses propos. Même à l’heure actuelle où le politiquement correct fait rage …
D’ailleurs, la débauche ici pourrait presque être excusée par l’emprisonnement du Marquis. Comment, en effet, tromper une solitude pesante, si ce n’est par de la provocation ?
La véritable problématique voit alors le jour … Qui était vraiment cet homme méconnu en son temps ? Un véritable pervers ? Un fin provocateur qui joue de sa culture et de ses lettres en ces temps plus que troublés ?
A l’heure où la littérature érotique semble gagner ses lettres de noblesse (tout le monde s’affiche avec ce pseudo mummy porn que j’évoquais plus haut…), « DAF Marquis de Sade » permet de revenir alors à une valeur sûre et surtout inépuisable.
Pourtant, malgré tout, certains choix dans la mise en scène laissent sans voix. Quid de ce pantalon en cuir ? Était ce vraiment nécessaire pour incarner ce Marquis ? N’était-ce pas un peu too much et trop convenu ? Quid aussi de ce passage du Marquis dans les rangs du public ? Faut-il y voir une volonté d’être au plus proche du public ? Mais Et ces chiffres que le Marquis ne cesse de vouloir décrypter dans les lettres reçues, à quoi mènent-ils vraiment si ce n’est que d’arriver à la conclusion que Sade n’était pas forcément si sain d’esprit que ça.
Folie, perversion, provocation, une pièce de théâtre qui interroge encore une fois sur ce Marquis, qui malgré tout gardera pour lui encore tout son mystère.
De Pierre-Alain Leleu, mis en scène par Nicolas Briançon,
Avec Dany Verissimo, Pierre-Alain Leleu, Michel Dussarat, Jacques Brunet
Durée : 1H20
Au Ciné 13 Théâtre, 1, avenue Junot
75018 PARIS 18
du 9 janvier au 16 mars 2013.
Du mercredi au samedi à 21h30, et le dimanche à 17h30.
Tarifs : de 13 à 26€.
Réservations : 01 42 54 15 12