Je promène mes ongles sur le marbre froid. Le crissement remonte le long de mon bras. Il l’électrise. Je m’arrête et regarde.
Autour de moi ce ne sont que des chuchotis. La splendeur des lieux est un écrin que l’on se doit de respecter.
Quelques silhouettes déjà minuscules sortent du cadre. D’autres, des hommes et des femmes, portent leur regard vers le ciel. Ils arrêtent cette course qu’ils continueront bien assez tôt. Quelle réponse cherchent-ils ainsi ?
D’autres encore descendent les marches. Majestueux, leur ballet est silencieux. Ils glissent naturellement sur le fil du temps. Marche après marche. Deux à deux. Seuls dans leur union, invincibles presque, ils ne semblent pas voir le monde autour d’eux. Dans leur bulle, touchant les marches d’un même pas, leur danse est limpide. Je les envie et aimerais m’accrocher à eux. Silhouette fantomatique, ma présence ne serait guère perceptible, mais leur chaleur me redonnerait ces atomes que j’ai perdus au fil des marches.
Je détourne alors mon visage. Ils sont déjà loin, je n’arriverais plus à les rattraper.
Là, un aigle victorieux, là un angelot annonciateur de bonnes nouvelles, je cherche des yeux la chimère qui me fera ployer. En vain. La tête me tourne, cette ruche silencieuse m’étourdit, le vertige s’accroît, je ne sais plus où est ce sol salvateur.
Je me penche un peu trop. Je tombe.
Personne pour venir vers moi.
Je suis morte depuis tellement d’années. Personne pour me voir.
Je me redresse et regarde l’ouverture vers le ciel. Quand me permettra-t-on de grimper jusqu’en haut et d’accéder à cette lumière si douce et chaleureuse. Mon errance n’a que trop duré, il serait temps qu’on me permette une certaine stabilité.
Alors de nouveau, je glisse mes doigts sur ce marbre froid et entame une nouvelle montée vers le Paradis.
© Leiloona, le 23 décembre 2013
Le texte de Jacqueline :
Tours et détours
Tournez, tournez les roues de la fortune
Regardez, regardez les belles images.
Et qu’ça tourne, et qu’ça tourne
Rien ne va plus m’sieurs dames
Vous passez encore ce tour.
Tournez, tournez en rond
Jouez, jouez votre destin.
Et qu’ça tourne, et qu’ça tourne
Rien ne va plus m’sieurs dames
Vous passez encore deux tours.
Tournez, tournez les têtes
Grimpez, grimpez le colimaçon.
Et qu’ça tourne, et qu’ça tourne
Rien ne va plus m’sieurs dames
Il faut faire demi-tour.
Le texte de Queenie :
Qu’est ce que tout ce monde fait dans ma tour? Pourtant, habituellement, personne n’a le droit de monter jusqu’à moi. Tout ce bruit… Ces murmures, ces éclats de rire et… D’où proviennent ces éclats de lumières aussi bref qu’inattendus?
Je suis perdue. Ces personnes qui montent et descendent à leur guise sont habillées de façon si étranges. Peut-être sont-ils des étrangers de pays lointains? Sommes-nous en guerre? Ils sont surement venus dépouiller nos terres mais ils ne trouveront rien ici, je suis seule, tellement seule depuis des années.
Mais peut-être voudront-ils bien me délivrer et me laisser les accompagner dans leur pays. J’aimerais tellement pouvoir découvrir le monde dont j’ai été privée depuis ma plus tendre enfance, un monde dont je rêve chaque soir, pouvoir discuter avec des hommes, des femmes ou des enfants, ici, je ne vois personne, on dépose tout de dont j’ai besoin devant le pas de la porte de ma chambre avant de m’enfermer à nouveau.
Il faut qu’on me trouve, que je leur dise que je suis ici… Là! Un homme passe tout près de ma porte. « Je suis ici, aidez moi! » Mais il ne se tourne pas, il ne m’entend pas et le son de ses pas s’éloigne de moi. Quelques minutes plus tard, une femme passe, il faut que je réessaie, peut-être n’ai-je pas appelé assez fort « Aidez moi, s’il vous plait, je vous en prie! » Mais elle s’en va en m’ignorant, elle aussi. Je désespère. On leur a surement dit de ne pas s’approcher de moi.
Plus personne ne passe, je ne sais plus depuis combien de temps j’attend. Depuis combien de temps suis-je ici, dans cette chambre qui m’est devenue si familière?
En regardant vers ce petit bout de ciel que je peux apercevoir par la petite fente dans le mur, je vois le ciel s’assombrir petit à petit, il fait nuit, déjà. Je resterai donc encore une nuit ici, seule, avec pour seul compagnie l’espoir de sortir un jour de ma tour et de pouvoir, enfin, découvrir le monde.
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Voici vos liens :
Stéphanie : Je monte, je descends
Yosha : La face cachée
La Plume dilettante : Visite guidée
Saxaoul (bienvenue ! As-tu attrapé le virus, alors ? )
je ne commente pas souvent mais suis toujours admirative ! Bonnes fêtes de Noël à toi !
Merci Violette ! Belles fêtes également ! 😀
@ Jacou : Beaucoup de textes sur le temps qui passe, sur cette roue de la Fortune aussi. C’est étrange comme un escalier peut nous emporter sur un thème aussi noir.
@ Leiloona : angoissante cette montée vers le Paradis…
@ Jacou : derrière la ritournelle, un côté sombre… j’aime beaucoup !
Surtout impossible. La pauvre …
Cet escalier ne semble pas inspirer des choses très joyeuses, pourtant, c’est Noël !!!
Non, j’ai trouvé aussi que ce n’était pas funky ! 😮
L’image est superbe ! Tout comme vos textes !
L’image est abyssale, oui. On s’y perdrait.
Deux très beaux textes
Merci !