Crédits photo © Kot
Il était las, n’en pouvait plus.
La poussière de la journée s’accumulait dans le creux de ses rides, ses jambes n’étaient que du plomb bientôt fondu, ses bras laminés, et sa bouche asséchée d’avoir tant parlé … Une main dans ses cheveux lui laissa entrevoir leur piètre état. Les épis étaient revenus et lui donnaient sans doute l’air d’un poussin tombé du nid.
Il souffla.
Il pouvait enfin, là, dans ce métro bondé de monde, tomber le masque qu’il portait depuis plusieurs semaines. Il n’avait plus de rôle à jouer.
Aujourd’hui, il avait rangé son bureau, vidé son frigo, fait son courrier, fermé sa valise et refermé la porte de son appartement à double tour. Jocelyne la voisine passerait de temps en temps donner de l’eau à ses quelques plantes vertes …
Là, au milieu de tout ce monde, il pouvait enfin montrer sa fatigue. Une grande inspiration, le temps d’un souffle, déforma son visage en un masque hideux. Puis il se reprit. Il se reprenait toujours.
Il tapota du bout des doigts sa valise qui était le prémisse de 15 jours heureux.
Une soupape. Un havre de paix. Coupé du monde. Un exil salutaire.
Il allait être heureux.
Son téléphone sonna.
Il décrocha, écouta blême l’autre au bout du fil, raccrocha.
Il inspira alors profondément, déjà le bâillement était un âge d’or révolu. Ce ne serait pas encore cette fois-ci qu’il penserait à lui. Il se leva et sortit du métro pour rebrousser chemin. Sa vaine valise couinait de dépit derrière lui. Il passerait d’abord dans un bar, prendrait un café serré, dompterait ses épis, puis, les marques de fatigue vainement effacées, il entamerait une nouvelle veille auprès d’un de ses nombreux amis.
…
Laisse-moi, bon samaritain, te donner mes épaules pour te reposer.
© Leiloona, le 16 février 2014
Voici vos liens :
Jacou : Du bâillement
Jean-Charles : Main devant la bouche
Sarah
Saxaoul
Etrangement, ton texte me parle
Pfff, rien d’autre n’est sorti … *idéefixe*
Ceci dit, ça s’y prêtait tellement bien