Rageot vient tout juste de sortir une nouvelle collection jeunesse qui consiste à réactualiser de grandes histoires d’amour littéraires. Le vent te prendra est une réécriture du magnifique roman d’Emily Brontë Les Hauts de Hurlevent, livre qui fut mon premier tremblement littéraire. J’avais à peine 13 ans et encore maintenant je me souviens du tsunami provoqué par cette histoire.
Aussi, ai-je été plus qu’interpellée : reprendre la trame romanesque et la transposer aujourd’hui ?
D’emblée le lecteur subit le vent glacial de Crosswind : tempête de neige, bourrasque … Cette petite ville est bien sinistre et porte en elle une légende, celle du « Vent gris » qui emporte les âmes torturées, à moins que ce ne soit cette bourgade qui rende les gens fous. Sinistre village choisi par Locke Wood, écrivain en quête d’inspiration. C’est dans une tour reliée par des passerelles vertigineuses qu’il logera et compte trouver le précieux déclic. Ce qui l’attend dépasse son imagination.
Imaginez débarquer dans un appartement soumis au froid, au vent et aux busards peu accueillants. Les occupants de l’appartement pourraient eux aussi sortir d’un roman fantastique. Ici, nul sourire, nul gentillesse. Le froid au dehors semble aussi imposer aux habitants la même froideur.
Heathcliff, le maître des lieux, est le pire de tous, et il impose sa tyrannie funeste à tous les occupants. Aussi lorsque Locke Wood lui avoue avoir aperçu le fantôme d’une femme aux cheveux noirs, la réaction du propriétaire est complètement démesurée.
Mais où est-il tombé ? Quelle est cette violence qui lézarde ces murs ?
Grâce à Sarah, une femme qui connaît Heathcliff depuis son plus jeune âge, l’écrivain lèvera le voile sur tous ces mystères. De quoi même lui redonner son inspiration. Mais n’est-ce pas jouer à un jeu dangereux ?
Le vent te prendra reprend effectivement toute la trame romanesque du roman de Brontë. Tout y est : l’intrigue principale et les secondaires, le paysage morcelé et complètement glacial, les personnages cruels, mais aussi la double narration, et nous retrouvons même un personnage portant le même nom que le frère d’Emily. Derrière la plume, on se doute qu’il y a un véritable amour pour Les Hauts de Hurlevent et pour la plume d’Emily Brontë. Et l’hommage est ici plutôt réussi. Même si ce roman fait le quart de l’original, un réel effort de mimétisme a été fait.
J’ai plongé dans l’histoire, j’ai ressenti le même attrait pour ces personnages torturés et cruels, animés de vengeance par égotisme profond. Si Anne ne dit pas « Je suis Heathcliff », mais « Je t’aime parce que tu es moi », on ressent de nouveau les excès de la passion cruelle et dévorante. La magie a finalement de nouveau eu lieu.
Toutefois, même si je ne peux que me réjouir de voir une collection reprendre les grands livres classiques pour les actualiser et toucher de nouveau un lectorat jeune (et ça, la prof de lettres que je suis ne peut que se féliciter de cette idée), tout au long de ma lecture j’ai eu vraiment du mal à croire que cette histoire si terrible sur de nombreux plans puisse encore se passer de nos jours, et je n’ai pas réussi à imaginer des personnages contemporains. A l’heure actuelle par exemple, je pense que certains services sociaux mettraient vite le nez dans ces histoires de famille peu reluisantes. Peut-être aussi ai-je encore trop à l’esprit le roman de Brontë, et ai-je été incapable de transposer l’intrigue au XXè siècle ?
Malgré ce bémol, qui reste ma foi petit, j’ai dévoré ce livre pour son atmosphère glaciale et ses personnages cruels. Et si je doute que l’adolescente lira par la suite Les Hauts de Hurlevent (de nos jours la vue de 500 pages donne de l’urticaire à n’importe quel ado normalement constitué), peut-être certains iront tout de même voir par curiosité l’original qui, ma foi, reste davantage ancré dans les tripes et le coeur. Un classique indémodable.
LE VENT TE PRENDRA
AUTEUR : CAMILLE BRISSOT
EDITEUR : RAGEOT
COLLECTION : IN LOVE
Mars 2015 – 10.50 Euros
Roman à partir de 14 ans
ISBN : 9782700242843
THÈMES : AMOUR, ECRITURE, FANTÔME
Une démarche plutôt intrigante… Affaire à suivre 😉
Oui, je suis curieuse de découvrir les autres titres ! 🙂
Mouais, ça ne me tente pas du tout 😉
Tout comme pour Dan, : je peux comprendre. Moi j’aime bien, j’ai hâte de découvrir Tite et Bérénice aussi …
Je vais passer mon chemin, je préfère garder en mémoire l’original 😉
Je peux comprendre ! 🙂
Ceci me laisse aussi perplexe que lorsque de jeunes chanteurs reprennent des vieux tubes (« Il suffirait de presque rien » de Reggiani repris par Thomas Dutronc, bof ! ) mais de temps en temps, il y a des perles et on redécouvre la chanson (quand Arno reprend Adamo dans « Z’étaient chouettes les filles du bord d’la mer, tsouin, tsouin…). Donc, je ne sais trop. J’en reste à Emily…
Ah oui ? Moi j’aime beaucoup quand on reprend de vieux titres … après tout la pratique est courante depuis longtemps : Molière et la Fontaine ont joyeusement pompé leurs gros titres à des auteurs de l’Antiquité ! 😀
Pas tenter ! il vaut largement mieux lire l’original !
Ah oui, je pense aussi, mais s’il permet de toucher un plus large lectorat, moi j’dis que c’est une chouette idée !
aïe la faute « tentée » bien sûr !
Hi hi, roh m’dame, z’avez fait une fôthe là ! 😀
😉 !!!
Ah moi qui adore Brontë, je suis curieuse de lire ça !
Voilà, j’étais dans le même état d’esprit que toi ! 😀
Je ne connaissais pas cette nouvelle collection et tu m’intrigues car ta critique est plutôt favorable ! Pour ma part, c’est Jane Eyre qui a bouleversé ma vie à 13 ans, j’ai lu les Hauts de Hurlevent plus tard et … tu me donnes envie de les relire !! Toutefois, cette collection m’intéresse pour mes élèves alors je prends note. merci !