Lucien Clergue, Premiers albums, au Grand Palais

Nu de la mer ©Atelier Lucien Clergue

Nu de la mer ©Atelier Lucien Clergue

Il existe des rencontres qui marquent toute une vie. Celle de Lucien Clergue s’appellera Pablo Picasso. A l’occasion d’une corrida à Arles, les 2 hommes se rencontrent. Une évidence quand Clergue montre ses premières photos au peintre. Il n’a pas encore 20 ans. Très rapidement il évolue dans le cercle Picasso, Cocteau … 

Le poète et le sphinx ©Atelier Lucien Clergue

Le poète et le sphinx ©Atelier Lucien Clergue

Pour comprendre l’oeuvre de Clergue, revenons à son enfance, à cette mère qui voyait déjà son fils devenir un grand artiste. Mais la maladie s’empare d’elle, la ronge : son fils la veille. Jusqu’à sa mort. Comment alors ne pas être marqué par le visage de la maladie ? Par les traits émaciés de sa mère ? La mort hantera alors ses photos, tout comme l’amour et la volupté. Les deux s’entrechoqueront et se répondront dans une certaine harmonie. Nous retrouvons encore une fois le couple infernal Eros et Thanatos …

Les 7 albums de planches-contacts retrouvés après sa mort montrent effectivement comment Clergue a réussi à dépasser, à sublimer la mort. Animé par une sourde mélancolie boostée par le regard passé mais toujours porteur de sa mère, l’artiste transcende alors sa souffrance grâce à la photographie.

Là, des photos de sable, de coquillages, Arles en ruines après les bombes …. ici des ruines et des charognes. Baudelaire était déjà passé par là, et on pourrait très bien prendre un poème pour illustrer ces cadavres sans lumière. Une certaine fascination s’exerce alors sur ces corps inertes. On les trouverait presque beaux sous l’oeil artiste de Clergue. Un impulsion certaine qui les rend autre que morts.
Troublant.

Troublants aussi ces nus féminins tout en ombres et lumières. Un cadrage, un angle de vue particuliers, et voici les corps magnifiés. Pas de tête, seulement des corps alanguis et désirables. Certaines photos accompagnent des poèmes d’Eluard : les 2 arts s’interpénètrent et célèbrent la Vie, la sensualité. La série « Né de la vague » est assurément la plus somptueuse. Plaisir partagé, quand on laisse traîner une oreille …

©Atelier Lucien Clergue

Née de la vague ©Atelier Lucien Clergue

Il est évident que Clergue apporte aux sujets photographiés une certaine aura, à l’instar de ces gitans. Un regard et une posture qui les rendent là encore sacrés, comme des messagers divins.  Le sens de la fête aussi qui éclate sur ces photos, on entendrait presque les guitares et les chants en tendant l’oreille …

Gitan ©Atelier Lucien Clergue

Gitan ©Atelier Lucien Clergue

La série qui m’a le moins parlé fut celle des « Toros ». Clergue, habitant d’Arles, a toujours photographié des corridas, ses photos de l’animal, au sol, notamment, lui ont valu une certaine distinction, démontrant et prouvant que le véritable « héros » de la corrida était l’animal …

Taureau mourant ©Atelier Lucien Clergue

Taureau mourant ©Atelier Lucien Clergue

Là encore, il oscille entre Eros et Thanatos.

Une exposition troublante, je ne connaissais pas la vie de Clergue et il est indéniable que les douleurs de son enfance transparaissent sur ses photos, éclatent, et transcendent même les années. Ses photos possèdent une véritable force, un certain pouvoir hypnotique que vous auriez tort de bouder.

Lucien Clergue
Les premiers albums
Jusqu’au 15 février 2016
Le Grand Palais
Ouvert tous les jours sauf le mardi
De 10 h à 20 h
Nocturne le mercredi 22 h

11 comments

  1. Chroniques de Nimentrix says:

    Belle exposition. Je vais certainement aller jeter un oeil (deux même ) à l’expo consacrée à ce photographe maniant si bien noir et blanc, érotisme, fête et sa vision de la mort.

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  2. aifelle says:

    J’ai vu plusieurs photos de Lucien Clergue, au hasard des expos, surtout les femmes et elles sont souvent sublimes. Je suis assez tentée par cette expo.

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    • Leiloona says:

      Aifelle : oui, c’est ce qu’on retient de Clergue, mais les autres sujets sont tout aussi sacralisés. Suis tombée en amour pour ce regard posé sur la vie. C’est beau aussi une telle rencontre inopinée. 🙂

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  3. titine75 says:

    Je trouve ses nus féminins absolument sublimes et j’apprécie également beaucoup sa série sur les gitans. Tu as bien fait de préciser que ses photos sur la corrida magnifie l’animal car ça me freinait. reste à voir si je trouve le temps d’y aller…

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