A tort ou à raison, Michel Bouquet

En ce moment, et jusqu’au 30 avril, au théâtre Hébertot, se joue « A Tort ou à raison », avec Michel Bouquet. Grand retour de ce comédien dans ce rôle qu’il a déjà joué jadis.

A plus de 90 ans, le comédien renoue alors avec le personnage de Wilhelm Furtwängler. Nous sommes à Berlin, en 1946. Le commandant Steve Arnold est chargé de mener l’enquête sur l’ancien chef d’orchestre. Pourquoi a-t-il continué de jouer sous le gouvernement nazi ? Pourquoi a-t-il salué Hitler lui-même ? A-t-il collaboré avec le dictateur ? 

Furtwängler, sur le banc des accusés, se défend : s’il a continué, c’est seulement au nom de l’Art, qu’il considère comme la source même de l’Humanité. Mise sur un piédestal, la musique permettrait de transcender la vie, d’être plus forte que tout ce qui se passait alors.

Est-ce un crime d’avoir voulu vivre pour l’Art lors de cette période ? Le chef d’orchestre jouit toujours d’une belle réputation, on sait qu’il a aidé des juifs à fuir le pays, mais le commandant ne cesse de soutenir que ce n’était qu’une couverture pour mieux profiter des privilèges du Reich. Sur scène, il est le seul à voir en Furtwängler un traître qu’il faut condamner.

Quand la voix de Michel Bouquet s’élève sur scène, une certaine magie opère. Une musicalité particulière, avec des souffles au milieu des phrases accentuant la tension dramatique sur scène. Le comédien redonne vie au chef d’orchestre, avec ses tourments et ses doutes. C’est un vieil homme d’une volonté et d’un déterminisme impressionnants avec ce juste mélange de faiblesse.

L’autre grand rôle de cette pièce revient à Francis Lombrail (le directeur du théâtre Hébertot) qui joue le commandant américain. Quelle verve ! Quel caractère ! Un homme déterminé et fier de servir une noble cause, mais hanté par des images vues lors de l’ouverture des camps. Lui aussi incarne son rôle, le vit et transporte ainsi le spectateur 70 ans en arrière.

Ronald Harwood, le scénariste du film « Le Pianiste », offre là une pièce sans temps mort où les répliques fusent. Le spectateur oscille d’un côté ou de l’autre : tort ou raison ? Innocent ou coupable ?

1 h 45 qu’on ne voit pas passer, focalisé sur ces êtres perdus dans le maelström de l’Histoire et incapables de trancher. « A tort ou à raison » est une pièce historique et politique qui questionne l’Art, sur ses implications dans le réel. Par ricochet, la pièce questionne aussi tous les hommes. Et vous, savez-vous ce que vous auriez fait à cette époque ?

Auteur : Ronald Harwood
Adaptation : Dominique Hollier
Réalisateur/Metteur en Scène : Georges Werler

Interprète : Michel Bouquet , Francis Lombrail , Juliette Carré , Didier Brice , Margaux Van den Plas et Damien Zanoly
Théâtre Hébertot
Du mercredi au samedi à 21 h, le dimanche en matinée à 17 h
De 17 à 50 €

2 comments

  1. Ch.B says:

    Oui! Quel comédien…. et quelle voix… J’imagine le silence dès les premiers mots .
    L’ai vu il y a quelques années dans le malade imaginaire, grandiose ! Merci pour cette proposition bien tentante.

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