Pour ne pas sombrer tout à fait, je n’ai trouvé que ceci : je me souviens du corps, du sexe blanc, veineux, des grains de beauté. L’éblouissant souvenir me sauve de la ruine.
Une claque, un roman fort, des sentiments à fleur de peau. Sur ces émotions qu’on voudrait parfois cacher, mais qui transpirent malgré tout par tous les pores de notre peau, sur ces sentiments forts et évidents qu’on ne peut nier, sur cette tristesse aussi quand l’absence fait rage, sur ce mouchoir qu’on appose pour ne plus souffrir et continuer d’avancer. Mais avec toujours, toujours dans un coin de notre tête cette petite musique qui nous fait penser à l’autre.
Arrête avec tes mensonges est le premier roman écrit sans phare par Philippe Besson. Ce livre, c’est son histoire, celle qui a fondé sa charpente d’homme adolescent et d’homme adulte. Une histoire d’amour fou, de corps qui parlent, de sentiments contre lesquels il n’a rien pu. De cet homme qui un jour n’a plus donné signe de vie. Du jour au lendemain.
Un roman sur son parcours d’écrivain, sur les thèmes qui hantent ses pages, sur ces séparations et ces abandons. Enfin il explique, enfin il arrête avec ses mensonges, comme lui disait sa mère quand il inventait déjà des histoires petit. Ce livre, c’est celui de la révélation, c’est un hommage à cet homme qu’il n’a jamais oublié, qui a hanté ses textes et sa façon d’être. Jusqu’à présent, il le distillait dans ses narrations, à travers des fictions. Mais ne se raconte-t-on pas à travers nos histoires ? Aussi éloignées soient-elles de notre vie ?
Il y est question ici d’âmes liées malgré la séparation géographique. Parfois, effectivement, on ne peut rien y faire. L’amour est là. A quoi cela servirait-il de lutter contre ?
Et puis, n’est-ce pas le plus joli lâcher prise ?
J’ai refermé le roman avec des hoquets dans la gorge, les yeux humides. Nul pathos ici, juste une beauté certaine et dénuée de tout intérêt. Juste écrire avec les tripes, se livrer comme il ne l’a jamais fait, mais sans voyeurisme aucun. Et n’est-ce pas là l’essence de la beauté ? Agir et être sans intérêt aucun ?
Une confession sur cet amour, un retour sur son parcours d’écrivain, sur son homosexualité, sur les années sida, un regard sur ces années 80 et sur la difficulté d’être vraiment soi. Bouleversant.
L’an dernier, je lisais Les Passants de Lisbonne avant de rencontrer l’auteur. Il y décrivait déjà l’absence, le manque … Ici, comme des pièces d’un puzzle il met des mots terribles sur ce qui a fondé son parcours de romancier. Beau et effrayant à la fois.
Et encore une fois lu en un souffle, ou presque …
Auteur Philippe Besson
Editeur Julliard
Date de parution 05/01/2017
EAN 978-2260029885
ISBN 2260029884
194 pages
18 €
L’Irrégulière a aimé elle aussi.
Tu confirmes ma tentation d’achat prévu vendredi
Enfoncée dans mes livres policiers, polars et cie, un tel livre ferait du bien à découvrir.
Je serais tentée de lire d’abord le premier avant celui-ci. Est-ce vraiment nécessaire ?
Merci pour cette belle chronique et aussi pour la réponse à ma question.
Geneviève