Elle sortit de la chambre avec un mal de cheveux monumental. La tête lui tournait. Elle avait encore dû trop boire hier soir. Sous ses pieds, le parquet froid grinçait, elle s’amusait à poser son talon puis à déplier lentement son pied jusqu’aux orteils. Un joli ballet matinal. En bas, pas une âme qui vive. Toutefois en s’attardant sur ce silence, elle perçut sur sa droite, dans la cuisine, un lent goutte à goutte. Une odeur parvint en même temps à ses narines. Celle du café. Qui l’avait mis en route ? La main posée sur la rambarde blanche, elle regardait ce salon telle une araignée. Sauf que là, ce matin, c’était elle qui devait en avoir une au plafond …
Elle ne savait pas où elle était. Ce qu’elle voyait en plongée ne lui disait rien. C’était élégant, d’une propreté remarquable, à son goût, mais aucun objet ne lui rappelait une anecdote vécue. Elle tenta alors de se remémorer la veille. En vain. Seul le martèlement du sang dans ses oreilles répondait en borborygmes syncopés. Une véritable musique contemporaine à la Iannis Xenakis. Cauchemardesque donc.
Elle descendit pas à pas cet escalier. La soie de son déshabillé, enfilé à sa sortie du lit pour cacher sa nudité, frottait suavement contre sa peau. Elle ne se souvenait certes de rien, ce n’était pas une raison de descendre sans panache ni déhanché. En bas, à gauche de l’escalier, sa parade fut arrêtée par un miroir et son reflet. Son sourcil gauche se releva en point d’interrogation. Mais qu’était-ce donc ?
Orson se tenait sur sa droite, derrière le pilier. Chaque matin, il la regardait descendre. Il connaissait ses manies, cet air circonspect qui ne la quittait jamais. Chaque matin, elle finissait sa descente sur ce miroir et comprenait alors qu’elle avait bien 15 ans de plus que ce qu’elle croyait. Sa compagne ne se rappelait plus de rien. Suite à une mauvaise chute dans les escaliers, son cerveau avait effacé près de la moitié de sa vie. Et, chaque matin elle se réveillait en pensant qu’elle avait encore 20 ans.
Chaque matin, Orson se demandait ce qu’il allait bien pouvoir lui raconter aujourd’hui. Quelle vie lui inventerait-il ? Chaque jour était consacré à une nouvelle péripétie. Il devenait alors le grand magicien, celui qui crée, façonne et modèle et apporte à la vie sa douceur et son croustillant (comme les calissons qu’il aimait sucer dans son enfance.)
Il s’approcha d’elle et, avant qu’elle ne se retourne, il l’entendit chantonner :
♫ ♪♫ When they had the earthquake in San Francisco
Back in nineteen-six
They said that Mother Nature
Was up to her old tricks
That’s the story that went around
But here’s the real low-down
Put the blame on Mame, boys
Put the blame on Mame ♫♪♫
Aussi aujourd’hui joueraient-ils un remake de Gilda.
Quant à Rita, il n’y a que nous, lecteurs, pour voir sur son visage un large sourire. Voici 6 mois qu’elle adorait plus que tout son rôle d’amnésique.
© Alexandra K. a.d XII Kal. jun. MCMVI
Anselme :
J’ai bien reçu votre proposition de bien immobilier.
Malheureusement malgré la qualité de ses prestations et son standing je me vois en regret de décliner.
Les dieux n’habitent pas ce lieu.
Les choses ne vibrent pas et aucune histoire n’est imprégnée dans les fibres de ce parquet.
Les objets sont inertes. Cliniques. Aucune passion n’a adhéré à la matière ici, les seules vibrations ressenties sont celles des voitures qui passent dans la rue d à côté. Il faudrait des chaises en osier, des babioles, des bidules, du vieux, du neuf, du sang, des pleurs. Il faudrait qu’ici ait habité la plus noble des putains de la ville, le plus crapuleux des criminels du comté. Il faudrait que sur ce canapé des couples illégitimes se soient aimés, que des enfants aient tué grand-mère, que le vaccin de la rage ait été découvert dans cet évier. Que la pierre de la cheminée vienne du stromboli et que les fenêtres donnent sur le repère secret de René-la-virolle.
Il faudrait qu’un grand musicien ait usé ses doigts et sa jeunesse sur une guitare en érable, que le whisky ait imprégné les murs lors de soirées où des poètes américains auraient sacrifié poulets et vierges sur l’autel d’un génie plusieurs fois millénaire.
Dans cette maison je ne sens pas cette douce folie, l’ataraxie des deux heures du matin quand la femme regarde l’homme et se dit qu’après tout c’est très bien ainsi. Les lutins, les elfes, les gueux, les gueuses n’ont jamais vomi leur superbe verve dans ce salon.
Cette maison a été imaginée par un architecte sans imagination et probablement sans passion.
Avant, ici, ne poussait pas même un vieux cimetière indien, ni aucune ancienne distillerie de rhum. C’était un champ de betteraves jusqu’à ce qu’un quelconque promoteur ne décide d’en faire un quartier résidentiel.
Alors, vous me voyez, moi l’écrivain, habiter cette morne maison ?
Claude :
Conte de mai
En ces temps là, ceux qui avaient du travail n’en manquaient pas. Il fallait travailler pour gagner de l’argent et surtout travailler plus pour en gagner plus. Non pour en vivre, mais pour posséder.
C’était l’apogée des banques et des fonds de pensions. On prenait des crédits ou on plaçait son argent pour qu’il rapporte, et avec les bénéfices accumulés, on achetait encore et on plaçait toujours. Pas le temps de profiter de la vie ou de ses biens et encore moins de partager. Le travail était une finalité. Le pouvoir le transformait en vertu.
Benjamin n’échappait pas à cette règle. Cadre à la Dawson & Hell International, il passait quasiment tout son temps dans le tourbillon de son entreprise, happé par son bureau, les conventions, les séminaires et les multiples déplacements. Il n’était que très rarement chez lui. Il gagnait beaucoup et dormait peu.
Cependant, il était propriétaire d’un bel appartement acheté rapidement via une agence et meublé à la va-vite sur catalogue de luxe. Superbe logement, mais constamment vide. Sa seule présence était parfois la nuit tard pour un sommeil rapide après avoir jeté un œil, debout une bière à la main, sur les infos de BFM TV.
Une petite araignée et sa famille vivaient discrètement sur de magnifiques toiles tissées patiemment et avec habilité dans les moulures du plafond de la salle de séjour. Une petite vie calme, ponctuée de copieux repas d’insectes et de promenades tranquilles dans tous les coins et les recoins de la demeure déserte.
Une nuit, l’araignée vit un Benjamin, toujours en costume, plus attentif et préoccupé que d’habitude devant sa télé allumée. Elle descendit le long du mur pour en avoir le cœur net. Elle s’aperçut avec intérêt que le poste diffusait en boucle les résultats des élections présidentielles et les probabilités d’un nouveau gouvernement. Elle resta un moment à regarder les différents pourcentages et les premières déclarations, fit une rapide analyse et remonta rapidement vers sa toile.
L’araignée avisée, tellement heureuse, appela à la hâte toute sa famille autour d’elle. Avec un large sourire et une mine de soulagée, elle déclara solennellement : « Tout va bien, on va encore être tranquilles pour cinq ans ! ».
Nady :
« Nogent sur Seine, le 21 mai 2017
Mon Cher Amour,
Je pars… Je t’aime, mais je pars. Tu ne me retrouveras plus ici ce soir. Je m’enfuis, je m’envole, comprends moi bien mon chéri, je te quitte. Sans cri, sans pleur, je sors de ta vie.
Un dernier regard sur cet espace de vie qui a abrité nos amours interdits, notre semblant de sentiment d’éternité tous les deux devant une réalité souvent esseulée. Je glisse dans l’enveloppe ce cliché, la dernière image sur laquelle je me suis arrêtée quelque temps avant de quitter cet antre de plaisirs, de pleurs et de solitude que tu m’avais offert il y a quelques années.
Tu trouveras cette lettre sur la table en marbre de la cuisine. Le marbre, cette matière que toi et moi affectionnons plus que tout. Notre table… Celle où j’aimais souvent me poser, un verre de vin blanc à la main, et te regarder cuisiner… Celle où tu adorais m’aimer dès que tu arrivais tellement le feu du désir nous envahissait dès que tu franchissais la porte de l’entrée, au point de ne pas pouvoir plus attendre, ni monter à l’étage vers la chambre à coucher. Celle où je passais aussi de longues nuits à grignoter plein de saletés, seule, devant la télé, pendant que tu allais la retrouver.
Avec elle tu t’es marié… Parce qu’avec elle tu as connu le doute, les débuts plein de galères. Elle a toujours été là pour t’épauler, t’encourager, t’aimer aussi à sa manière. Elle, tu l’as laissé enfanter, moi tu m’as ordonné d’avorter. Tu n’as pas voulu reconnaitre votre enfant, ça aurait dû me consoler ?
Aujourd’hui tu rayonnes à Paris et en Europe. Ton nom est cité partout où on parle Art. Tes sculptures s’arrachent à prix d’or. Bien sûr, je sais que tu n’oublies jamais de me citer mais on me voit toujours comme l’assistante de Monsieur Rodin, sa Muse parfois bien que par derrière on se plait à railler nos 24 ans d’écart. A l’aube de ma troisième décennie, il me faut encore patienter, faire mes preuves, m’effacer ??? Surtout ne pas te contrarier, particulièrement en ce moment sur ton grand projet de la Porte de l’Enfer où ton esprit est plongé dans l’étude de Daech qui te servira d’inspiration pour cette œuvre qui promet de faire beaucoup de bruit à l’exposition Universelle de 2025 dans notre capitale !
C’en est trop de tout ce manège ! J’ai tout supporté ! la jalousie de Rose qui venait me narguer parfois à la sortie de l’atelier avec votre moufflet, les critiques de mes amis qui n’ont jamais compris ce que je pouvais te trouver. Je n’en peux plus aussi de patienter de tous les côtés et je sais aussi que tu m’as déjà remplacée ; tes passages chez moi se sont espacés depuis quelques mois… En même temps je comprends aussi qu’il t’est plus agréable de baiser tes nouvelles recrues de 20 ans, à la peau tout fraîche, n’ayant connu ni une grossesse comme Rose qui plus est, est aussi âgée que toi, ni un avortement et 3 fausses couches comme moi…
Tu vois, Auguste, si ce n’est pas de l’amour cela de tout te pardonner ! Mais je t’avouerai que cette passion qui me dévore pour toi va finir par m’aliéner. Déjà, mon généraliste commence à me parler de Burn out quand il me voit et il est à mille lieux de tout savoir de moi, de nous. Il me faut donc me sauver pour ne pas me perdre car j’ai quelque chose au fond de moi, encore plus fort que tout mon amour pour toi. Ces moments où je suis plongée dans la création me transcendent, j’ai un besoin inexpliqué et insatiable de façonner autant la glaise que le marbre. Et dans ce domaine je ne suis pas encore arrivée à saturation, comme je le suis dans ma passion avec toi.
Promets moi de ne pas chercher à me contacter. Je quitte la France, je change d’identité, je m’éloigne aussi de la toxicité de ma famille, inutile donc d’aller quémander des informations auprès de ma mère et de Paul. D’eux aussi, je suis arrivée à saturation. Leur jalousie excessive devant ma liberté assumée, leurs mesquinerie et perversité ne me font pas avancer. J’étouffe Auguste et pourtant je ne suis pas encore arrivée à la moitié de ma vie terrestre ! Je me meurs à petit feu avec les miettes de temps que tu daignes m’offrir et leur emprise familiale étouffante et culpabilisatrice. Dieu m’a pourtant offert un talent, le même que le tien d’ailleurs alors il est temps que je le fasse vivre en plein jour sans être écrasée sous vos jougs qui se veulent moralisateurs et bienfaisants mais qui en fait agissent comme des freins pour m’empêcher de briller.
Je te laisse tout, d’ailleurs tout t’appartient, jusqu’aux murs de la maison dont tu paies le loyer. Je n’ai pris que mes affaires, mes sculptures et ma dignité.
ADIEU mon bel Amour,
Camille C.»
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Isabelle :
Pendant leurs presque 35 années de vie commune, Edouard avait tenté d’inculquer à son épouse Mitsouko le bien-fondé de son grand principe de vie : l’Ordre. A ses yeux, une décoration à la rigueur scandinave, un intérieur parfaitement rangé, propre au point de pouvoir manger parterre, avec chaque objet à sa place, était un témoignage d’un esprit clair et logique. Ce qui avait même séduit Edouard chez Mitsouko, c’était sa nationalité japonaise. Le peuple du Soleil Levant n’était-il point connu pour sa méticulosité ? Las… La jeune Nippone était aussi bordélique qu’un ado occidental. Pire : pour elle, toute tâche ménagère était à ses yeux une perte de temps, la privant du plaisir des rues et des musées parisiens. Elle suivait Edouard en soupirant dans les allées des boutiques de meubles du boulevard Saint-Germain, attendant de pouvoir enfin déguster un verre en terrasse. Le pire pour elle était la visite annuelle de la Foire de Paris et de ses stands de produits d’entretien nouvelle tendance. Edouard était alors comme un enfant dans un magasin de jouets. Elle était la désinvolture française, il était la préciosité japonaise. Bien sûr, ils n’avaient pas eu d’enfants. Un bambin eût été complètement incongru dans cet espace sans âme… Sans âme, pas tout à fait… Car depuis qu’Edouard était mort, il hantait les lieux, planant au plafond de son appartement enfin à son goût. Mitsouko, complètement désarmée bien qu’éprouvant une liberté certaine, avait enfin obéi aux préceptes de son mari et mis en ordre leur lieu de vie. Les rares bibelots, les meubles de haute facture, les tapis… elle avait tout placé tel qu’il le lui demandait depuis des années. C’était peut-être pour ces raisons qu’elle passait autant de temps sur la terrasse, ne supportant pas d’avoir finalement cédé à une maniaquerie qu’elle ne cautionnait pas. Mais Edouard était ravi, à l’instar d’un professeur de latin qui a enfin réussi à faire comprendre à ses élèves la déclinaison des adjectifs de deuxième classe. Par conséquent, il ne comprenait pas ce qu’il faisait toujours là. N’avait-il pas accompli sa mission ? Ne pouvait-il être libéré et partir enfin dans cet endroit où tout était toujours si blanc, si pur ? C’est qu’il s’ennuyait maintenant… Mitsouko était au téléphone sur la terrasse et Edouard ne pouvait entendre ce qu’elle disait, mais il comprit bien vite de quoi il retournait quand, une heure plus tard, il vit débarquer un couple de trentenaires avec deux énergumènes complètement hystériques qui hurlaient et couraient partout… une famille !! Qui parlait d’abattre des cloisons, de mettre de la moquette (le cauchemar!), du futur emplacement de la télévision, cette innommable source de bruit. Et Edouard comprit pourquoi il était toujours là… il allait devoir leur apprendre…
Jos :
La folie des grandeurs
Du haut de l’escalier, la main posée sur la rambarde, John regardait cette maison qui ne lui ressemblait plus. Tout était parfait : les jouets des enfants avaient disparu, la balle du chien aussi ; les magazines habituellement éparpillés dans le salon avaient été rangés, sa veste ne traînait pas sur le canapé et la cuisine était rutilante. N’eût été la présence du petit bouquet de fleurs jaunes sur la table de la salle à manger, n’importe quel visiteur aurait cru l’endroit inhabité.
En faisant le tour du terrain, John avait ressenti la même atmosphère sans vie. Rien n’altérait la beauté du gazon fraichement tondu et les transats étaient alignés autour de la piscine dont même l’eau bleue et limpide ne frémissait pas.
L’étage aussi n’avait plus d’âme. Chaque pièce resplendissait de propreté et aucun objet inutile n’était visible. John ne se reconnaissait plus dans cet intérieur où il s’était senti si bien jadis.
Tout avait commencé 5 ans plus tôt. Dès la première visite, Joanna et lui avaient eu le coup de foudre pour cette maison. Ils s’imaginaient déjà recevoir leurs parents et amis dans cette propriété élégante et y voir grandir les nombreux enfants qu’elle pouvait accueillir. Impatients, ils avaient appelé l’agent immobilier deux heures après son départ et insisté pour signer au plus vite l’achat de ce qu’ils considéraient comme le moyen de se voir admettre dans la cour des grands.
Loin de les freiner dans leur folie des grandeurs, l’organisme prêteur les avaient rassurés : les taux d’intérêt étaient stables et l’appréciation de l’immobilier était régulière. Ils pouvaient sans crainte contracter cet emprunt dont les 3 premières années étaient couvertes par un taux fixe. Obnubilés par la réalisation de leur rêve, ils avaient mis de côté le fait que ce même taux devenait par la suite révisable et avaient signé le contrat de prêt hypothécaire que le conseiller leur avait présenté.
Les premières années avaient été idylliques. Ils avaient aménagé leur nid douillet avec soin et deux enfants étaient venus parfaire leur vie. Joana avait cessé de travailler pour s’occuper de sa petite famille et organiser de nombreuses réceptions dans cette demeure qui faisait l’admiration de tous. Ils étaient fiers du chemin parcouru et de la tournure qu’avait pris leur vie.
Mais c’était sans compter sur les aléas des marchés financiers et particulièrement celui des subprimes. Le taux d’intérêt fut revu à la hausse tandis que les prix de l’immobiliers commencèrent à chuter. Comme beaucoup d’Américains, le couple parvint plus à honorer les mensualités devenues exorbitantes. Ce défaut de paiement en masse accéléra la baisse du marché de l’immobilier et les banques dont la perte se chiffra à plusieurs centaines de milliards de Dollars expulsèrent sans scrupule tous ces faux riches attirés par le miroir aux alouettes et hypothéquèrent leurs biens.
Joana et John n’eurent pas le choix : ils devaient quitter les lieux le jour même.
John jeta un ultime regard sur la maison qu’il n’avait jamais vraiment possédée et qui ne serait jamais la sienne et descendit l’escalier pour la dernière fois.
Val :
La maison de mes parents, que dis-je le palais de mes parents. Le nec plus ultra à tous les niveaux : son emplacement dans un super coin du sud de la France, en bord de mer, des pièces immenses, un équipement des plus modernes dans toutes les pièces. Le top à voir comme cela. Et pourtant, dès que j’ai pu, j’ai fui ce lieu. Je l’ai toujours haï, je crois, au plus loin que ne remontent mes souvenirs.
Mes parents étaient des gens de bonne famille et avaient eu la chance de faire un bon héritage leur permettant d’acquérir ce bien, mais c’était tous les deux des bosseurs et cette maison était aussi le fruit de leur « sueur ». Ils en étaient très fiers tous les deux, c’était leur bijou. Bien plus que je ne l’étais moi.
Sur cette photo, notre maison, enfin leur maison plutôt, ressemble à une maison de magasine mais elle était toujours comme cela. Rien ne devait jamais traîner, pas un journal, un verre, une miette, un jouet. Le salon m’était interdit. Je ne l’ai jamais vu que de là-haut sur la mezzanine où se trouvait ma chambre. Petite, je devais jouer seule dans ma chambre avec mes poupées. Il était hors de question que je descende quoi que ce soit :
– « On ne t’a toute de même pas fait une chambre de princesse pour que tu viennes envahir le salon ! »
Quand j’ai commencé à grandir et à rencontrer des amies, je voulais bien sûr partager du temps avec elles, mais ma mère ne voulait pas que je les invite à la maison.
– « Non, ce n’est pas possible. Je serai en train de faire le ménage ! »
– « Non, ce n’est pas possible, je viens juste de finir le ménage ! »
– « Non je ne veux personne à la maison ! Vous allez tout salir ou me casser quelque chose ! »
Ma mère était une maniaco-dépressive, je pense. Elle sortait du travail très tard, mais sans prendre cinq minutes pour moi, me parler, me demander comment s’était passée ma journée, me faire un câlin… elle se déchaussait et branchait l’aspirateur. Sitôt fini, elle passait la serpillère, le chiffon de poussière, nettoyait les sanitaires et les salles de bain. Mes parents avaient largement les moyens de se payer une femme de ménage, mais elle s’obstinait à le faire elle-même et semblait même y prendre un certain plaisir. De là-haut, je la regardais. J’espérais qu’elle me voie, qu’elle réalise qu’elle passait à côté de moi…mais telle Blanche-Neige, elle sifflotait heureuse d’astiquer sa maison.
Quand je fus en âge d’avoir des devoirs, j’aurais voulu m’installer dans la cuisine, m’étaler, montrer à ma mère mes cahiers, qu’on en discute, qu’elle me félicite, m’encourage. Mais là encore je devais rester confinée dans ma chambre et me débrouiller toute seule. Si elle rentrait et trouvait sur une table un crayon ou un cahier, j’avais droit à une scène.
– « Pour quoi ne fais-tu pas tes devoirs dans ta chambre comme tout le monde ! Il faut toujours que tu laisses traîner quelque chose ! Tu es vraiment pénible ! »
Comme j’enviais mes copines. Quand l’une d’elles m’invitait, je rentrais complétement déprimée. Pour plusieurs d’entre elles, leur appartement entier avait la taille de mon salon. Mais leurs parents, à elles, avaient un cœur énorme et du temps pour elles. On s’installait tranquilles dans des canapés souvent défoncés, on goûtait laissant des miettes partout, on rigolait d’une chose et d’autres avec leur mère ou leur père. On leur racontait notre journée, nos moments de rigolades, nos craintes ou nos espoirs. Ils nous écoutaient, nous donnaient des conseils, riaient avec nous. Quand je retournais à la maison, mes parents n’étaient toujours pas rentrés du travail. Souvent je mangeais seule un plat Picard sorti du congélateur. Ma mère, à peine arrivée, se lançait dans son habituel toc et mon père qui sans doute ne pouvait plus supporter cela non plus rentrait encore plus tard. La plupart du temps je ne le voyais même pas. Il venait m’embrasser dans ma chambre, la lumière déjà éteinte.
Au lycée, j’avais des facilités. Il faut dire que seule des heures durant j’étais souvent plongée dans des livres et j’avais ainsi acquis une certaine culture. Quant à ma pugnacité, elle était sans doute dans mes gènes. Comme eux, j’étais une battante. Au lycée, ma bataille fut de réussir au mieux mon bac S afin de pouvoir intégrer un lycée parisien. Je voulais à tout prix fuir cette maison, cette prison, ces murs dans lesquels j’étais malheureuse car complètement oubliée. J’y avais grandi toute seule, sans frère et sœur, sans parents, sans amour.
Mon bac en poche avec mention très bien, j’ai intégré le lycée Henri IV et je ne suis plus jamais redescendue dans cette maison. A dix-huit ans, j’ai tout quitté, mes amis, la mer… pour vivre. Mes parents ont continué de parvenir à mes besoins, m’ont payé un studio… L’argent est la seule chose qu’ils n’aient jamais partagé avec moi. Mais je n’en ai pas abusé. Mes études finies, je suis devenue très vite autonome, ne voulant rien leur devoir.
Aussi, revenir dans cette maison après toutes ces années est bien difficile. Quand mon père est mort, il y a cinq ans, j’ai réussi à ne pas y mettre les pieds. J’ai soutenu ma mère, je l’ai aidée à faire les paperasses, à organiser les obsèques mais à chaque fois nous nous sommes retrouvées chez une tante ou dans un café… Mais maintenant qu’elle l’a rejoint, il faut bien que je m’occupe de leur bien le plus cher. Je dois mettre leur bijou en vente et plus vite il partira, mieux ce sera.
Terjit :
Je vais me mettre là et attendre qu’elle rentre. D’ici elle ne me verra pas, l’effet de surprise sera parfait.
Il est 16 heures, logiquement elle est en train de dire au revoir à ses collègues. Dans 10 minutes elle sera sur le parking et me passera un coup de fil pour s’assurer que je suis bien arrivé chez William pour jouer au poker. Nous échangerons quelques banalités sur le déroulement de la journée puis nous nous souhaiterons une bonne soirée. C’est elle qui raccrochera en m’embrassant comme à chaque fois.
Elle démarrera sa voiture, le petit cabriolet aux vitres fumées que je lui ai offert l’année dernière pour son anniversaire. En passant la barrière le vigile lui fera un signe de tête qu’elle lui rendra. Elle prendra la voie rapide et après une vingtaine de minutes elle s’engagera dans la sortie qui donne directement dans notre quartier. Trois minutes plus tard elle fera une pause devant le portail, appuiera sur la télécommande et les pneus du cabriolet craqueront sur le gravier de l’allée. Garée devant le garage elle coupera le moteur, prendra quelques secondes pour vérifier son maquillage dans le rétroviseur, la portière s’ouvrira puis ses longues jambes à peine masquées par sa jupe sortiront de l’habitacle l’une après l’autre.
Elle passera sous le porche, ouvrira la porte, déposera son sac à main sur la table de la cuisine et se versera un verre qu’elle boira d’un trait. Par la fenêtre du séjour elle vérifiera que le piscinier est bien en train de faire son travail, elle a bien vu sa camionnette garée dans la rue. Ne le voyant pas elle pensera qu’il est dans le local technique à vérifier quelque chose et qu’il n’a pas entendu sa voiture arriver. Elle traversera le séjour pour aller dans notre chambre et se changer. Elle ressortira avec l’un de ses maillots brésilien parfaitement en harmonie avec ses cuisses galbées. En faisant le tour de la piscine elle l’appellera mais il n’entendra toujours pas. Elle ira vérifier dans le local technique mais il n’y sera pas non plus. Elle fera tout le tour du jardin pour le trouver, en vain. Fébrile elle retournera dans la maison et prendra son téléphone pour savoir où il est. La sonnerie retentira au premier étage mais il ne répondra pas. Elle abandonnera son portable dans la cuisine et montera l’escalier en colimaçon, inquiète qu’il ne réponde pas. Aux trois quarts de la montée elle le retrouvera assis, le dos callé dans l’angle du mur, les yeux clos. Elle trouvera ce petit jeu adorable et si romantique. Pour ne pas le réveiller en sursaut elle avancera à pas de velours puis glissera une main derrière sa nuque en prélude à un tendre baiser sur le front. Le contact, même délicat, sera suffisant pour que son corps bascule en avant et dévale l’escalier. Elle sera tétanisée en voyant les quatre trous sanglants traversant sa chemise dans le dos. Incapable de redescendre à cause du cadavre elle se précipitera vers le téléphone de la chambre d’amis. Elle sera stoppée nette dans son élan en me voyant au bout du pallier. Incapable de sortir un mot, pétrifiée par ce qu’elle vient de comprendre elle tombera à genoux en me traitant de fou. Le déclic de l’armement de mon 45 lui fera relever la tête une dernière fois.
Adèle :
C’est au printemps dernier que j’ai découvert la maison. Ma future maternité me donnait des envies de confort, le désir de couver sereinement, bien à l’abri dans un logement douillet.
J’explorais la région, parcourant agilement la campagne, quand j’ai découvert la maison, tapis au fond d’un jardin tranquille. La porte-fenêtre qui donnait sur la grande terrasse étant entrebâillée, il m’a pris la fantaisie de me glisser à l’intérieur. La pièce était grande, aérée, la lumière pénétrait par les grandes baies, l’ardeur des rayons du soleil était tempérée par des stores vénitiens. Ce qui m’a conquis, c’était cette grande hauteur sous plafond, tout ce vaste espace, cette verticalité qui me procurait beaucoup de sérénité. Le ventilateur à pales, lui, ne me disait rien qui vaille, je m’en tiendrais à distance, je craignais les courants d’air, si mauvais.
J’ai emménagé pour de bon à la fin de l’été, aux premières nuits fraiches. Ma grossesse débutait et j’avais tout le temps faim, des envies terribles de viande, le moindre petit morceau qui passait sous mon nez finissait dans mon estomac. Octobre est vite passé. Je tricotais presque jour et nuit, du fil doux et fin, d’un blanc pur, tranquillement installée dans un petit coin du salon. J’étais discrète, je ne voyais pas grand monde et c’était parfait comme ça, les gens sont parfois si méchants. S’ils m’avaient su enceinte, j’imagine déjà leurs cris de désapprobation. Peut-être même auraient-ils voulu attenter à ma vie ?
Enfin, au printemps, mes petits sont nés. Je les ai déposés avec mille précautions dans leur joli petit costume blanc, que j’ai boutonné soigneusement jusqu’en haut. Je ne les quittais pas des yeux. En quelques mois ils ont bien grandi. Au printemps ils se sont mis à bouger, j’ai senti qu’il était temps de les libérer. J’ai ouvert tous les précieux cocons, les petits m’ont sauté sur le ventre, s’accrochant à mes poils et nous sommes joyeusement partis tous ensemble, explorer le jardin à la recherche de quelques gouttes de rosée, et de moucherons à dévorer.
Ah, la belle vie que celle d’une maman-araignée !
Les textes écrits sur d’autres blogs :
J’ai aimé l’apparition de cette jeune femme, légère et éthérée, diaphane et spectrale, renaissant chaque matin à une vie nouvelle. Et le rebondissement final. J’ai pensé à En attendant Bojangles.
@leiloona ! 😉
Waaaaaw …crois-tu qu’on me décernera autant de prix avec ce court texte ? 🙂
De l’art de transformer son quotidien, oui, maintenant que tu le dis, y a de ça.
@Alexandra : ROooo la coquine ! Moi aussi je voudrai bien jouer à l’amnésique avec un Orson si créatif, aux petits soins dans cette belle villa ! 😉 J’ai adoré l’expression « toujours garder panache et déhanché », surtout en déshabillé de soie 😉
@Anselme : dans l’immobilier je préfère le neuf pour y mettre mes énergies, pas fan de lieux hantés par des rêves inassouvis, des drames tus parfois ou des passions avortées… Ton écrivain semble pourtant avoir beaucoup d’imagination, pas besoin qu’il s’encombre dans des atmosphères pleines de vibrations 😉 peut être que les âmes des betteraves ont quelque chose à lui raconter pour son prochain roman, who knows ?? :p
Nady : Ah ah … je te reconnais bien là pour le panache. Oui ! Et suis certaine que ton personnage aurait été en plus en talons aiguilles ! 😛
Effectivement, elle aurait tort de faire cesser le jeu, non ? 😉
hihihi, oui je la voyais aussi sur talons aiguilles 😉
oh oui, elle aurait tort et surtout qu’elle le garde bien cette perle, il m’a l’air fou amoureux ! 😉
♥
@Claude : comme ton conte de mai me parle et vient raviver la tristesse sur ce phénomène d’actualité dans un monde de plus en plus peuplé où la solitude humaine est grandissante au profit de l’idolâtrie des chiffres à faire fructifier !
@Isabelle : pauvre Edouard ! A quand le Paradis à ne rien faire pour lui ??? 😉
@Terjit : ça commençait bien cette histoire, presque je commençais à l’envier elle : finir le travail à 16h (d’ailleurs, a t elle vraiment besoin de travailler ??? ne me dis pas qu’elle est à un poste de responsabilités en plus, tu m’achèverais…), cabriolet offert par son bien aimé à son anniversaire (pas encore connu ce type de cadeau mais continue à rêver ;-)… bon pour le reste je m’y retrouvais (maillot brésilien, cuisses galbées…. etc…etc… 🙂 ) mais au milieu du texte j’ai pensé à ton teasing sur le cliché et là la panique commençait à monter 😉 tu as réussi à tenir et faire grandir le suspens à travers ta description, bravo ! (en général on préfère les jardiniers mais bonne idée de mettre l’accent sur les pisciniers. Je suppute qu’il était aussi son coach en natation avec des épaules bien développées, non ? Ralala, c’est vraiment dommage de faire partir aussi violemment des êtres aussi beaux ! :p
@Leiloona : un mélange de Bojangles, de « Avant d’aller dormir » et de « Desperate Housewives » 😉
Ah ah ah, oui, ce ne sont pas les restes du frigo du dimanche soir, mais les restes de ma bibli’ ! 😛
@Claude : quel bel humour ! Ton araignée m’a fait penser à celle, malicieuse, d’Odilon Redon 😉
@Nady, très beau texte, d’actualité (le film de Doillon, les 24 ans d’écart… très à la mode en ce moment 😉 )
Merci Iza, je guette sa sortie près de chez moi pour y courir, suis fan des 2 en fait 😉 mais un attachement plus grand pour Camille, statut féminin oblige 😉
Leiloona : ah ah la chipie !!
Anselme : c’est vrai qu’elle ne fait pas envie cette maison, mais tu le dis bien mieux 😉
Claude : Joli conte de mai qui a une arraignée au plafond !! 😉
Nady : oui quand on voit la froideur de cette maison, il faut partir…
Isabelle : un fantôme psychorigide… brrrr
Jos : sombre réalité !
Val : toute l’histoire d’une vie à travers une maison…
Terjt : très beau suspens !
Adèle : rhaaa encore une arraignée !! Mais je me suis faite avoir comme une bleue.
Merci pour ta lecture miss, ai pris du retard dans ma lecture sur cette petite semaine active, je file sur ton blog asap 😉
@ Antigone : Ah oui, le jeu, toujours le jeu, encore le jeu … 😉
@Adèle : tu m’as bien eue ! Le début de ton texte m’a apporté beaucoup de sérénité, cette recherche d’un lieu douillet pour y passer sa grossesse. Puis, cette envie de viande m’a interpellée et j’ai bien ri sur ta chute 😉 bravo !
@Anselme : Et si c’était cet écrivain qui insufflait l’âme de cette maison vierge d’émotion ?
J’ai adoré ses élans d’imagination, la rage sur l’évier, la pierre de Stromboli …
Claude : Celui-là, on peut dire qu’il a une belle araignée au plafond ! Mais elle est bien plus maligne que la mienne !
@Nady : tu mêles passé et futur , mais j’y vois surtout une situation contemporaine, avec non pas un triangle mais un carré amoureux. Le fameux polyamour ?
j’aime bien l’idée, me pencherai sur le carré, pas habituée à ce concept 😉 En fait j’ai voulu revisiter leur rupture à notre époque 😉
@Alex : je ne suis pas sûre que jouer les amnésique me plairait longtemps.. Dans » l’atelier des miracles » de Valérie Tuong une des héroïnes se faisait aussi passer pour une amnésique…ça peut vite être source de problèmes. Merci en tous cas.
Aaaah mais ce roman m’attend depuis sa sortie ! Je me demande pourquoi je ne l’ai pas lu d’ailleurs …
Je voudrais du temps supp’, être rentière, SVP ! 😀
@Anselme : tu fais bien ressortir le « manque d’âme » de cette maison.Au premier regard, à la première visite elle pourrait paraître sublime mais finalement pas du tout.bravo
@Claude : façon détournée de parler des élections. « Les araignées devraient être tranquilles encore cinq ans »: plusieurs façons d’interpréter ces résultats électoraux. Leur hôte va pouvoir continuer d’accumuler, de se tuer au travail, de capitaliser.. laissant les araignées jouir de sa maison. Ce ne sont plus les souris qui dansent mais les araignées. Les temps changent… ou pas. L’avenir nous le dira…
@Nady : l’histoire de Camille et Auguste revisitée, modernisée. Un texte qui change par rapport à d’habitude bien que l’on sente encore les « cris » sous-jacents. Bravo
hihihi merci Valérie, je vais tenter de la douceur un jour, faut qu’elle y trouve son chemin 😉
@isa Édouard ou le maître de l’ordre. De temps en temps j’aimerais bien un Édouard dans mon plafond pour inculquer certaines « règles de vie » à toute ma tribu. Ma maison est parfois un peu trop « vivante ». .. merci à toi
@Leiloona: le cinéma dans tous ses états…
@Anselme: comme toi j’aime les lieux qui ont une histoire à me raconter.
@Claude: pas folle, l’araignée!
@Nady: l’histoire revue et corrigée de Rodin et Camille Claudel…
@Isabelle: un gentil fantôme?
@Jos: sale affaire…
@Val: remuer le passé est parfois douloureux.
@Terjit: et dire qu’elle avait tout pour être heureuse… un bel appart et un mari.
@Adèle: un logement bien confortable pour cette araignée.
bien vu La plume et la page 😉 merci
La plume et la page : oui, c’est un peu ça en effet ! 🙂
Alexandra K : cet écrit est fluide, aérien, intelligent, il nous transporte dès la première ligne, nous sommes sur la pointe des pieds, retenant notre souffle, en haut de l’escalier. Peut-être un chapitre sorti d’un roman en court, qui sait …
Oh un grand merci la flibust !
Suis touchée par tes adjectifs.
Ils sont sincères, tes écrits me font à coup sûr découvrir des mondes inconnus, merci
C’est inspirant un escalier!
Cette maison a été la source de notre folle imagination!
Voui, et je me dis que la dernière fois déjà c’était un escalier.
Tonton Freud, youhou ? 😀
Il faudrait savoir comment il interprèterait cela…
Ne m’en parle pas, je ne veux même pas le savoir ! 😛
@Leiloona : chapeau à Orson qui chaque jour se renouvelle pour sa dulcinée mais tout de même quelle coquine de continuer à lui faire croire à cette amnésie. En tout cas c’est très très bien mené !
Ah ah, oui, je trouve qu’ils forment un joli couple, non ? Entre un créateur et une chipie. Non ? 🙂
C’est vrai qu’ils sont mignons et puis parfois se réinventer permet de faire perdurer la flamme 🙂
@Anselme : je rejoins l’écrivain sur la froideur de ce lieu. Quoi de mieux qu’une vieille bâtisse qui craque pour s’adonner à la création 🙂
@Claude : multiple interprétation dans ce texte, l’araignée semble heureuse de voir que d’autres ne tisseront pas de toile de haine mais ton personnage, je ne sais quoi penser. En tout cas joli résumé de ces vies qui sont de plus en plus folles et intenses et qui bien souvent s’accompagnent de solitude, si pas en apparence, au moins en soi.
@Jos : Aie. Le rêve qui tourne au cauchemar !
@Nady comme l’amour, encore plus lorsqu’il est interdit, peut être destructeur. Camille me touche beaucoup, comme un écho d’une certaine manière.
On ressent sa douleur, cette amertume et pourtant elle a cette grandeur de partir en laissant une impression d’apaisement. Le chemin de la dépossession est assurément proche avec une telle attitude. Bravo Nady
Merci l’Ivresse, ton retour me touche. Disons que si Camille était née de nos jours, elle aurait pris ce chemin de la dépossession (j’aime beaucoup ton expression) et elle aurait été aidée (inconnus, associations, coachs, psy, amis…) mais hélas elle est née trop tôt. Je regrette ses 30 ans d’isolement sans création… mais je m’arrête là je suis intarissable sur elle 😉
@jos : tu décris parfaitement ces années 2008/2009 que j’ai tant détestées…. Comme le texte de Claude, le tien m’a beaucoup interpellé cette semaine. Bravo pour ta plume sensible et authentique, bisous
@ Leiloona : Mazette , quel texte sublimissime ! J’adore, tout simplement ! Déjà parce que Gilda, c’est peut-être désuet de nos jours mais moi je trouve ça so glam’, et ensuite parce que franchement, la chute…clap, clap, clap !!
@ Nady : Etant moi-même une grande admiratrice de Camille , d’Auguste, d’art et d’amour, je ne peux que m’incliner devant le magnifique texte que tu nous livres cette semaine..Bravo !
Merci Nath, je te conseille son musée (à Camille) à Nogent sur Seine 😉
Nath : Ah oui, c’est vrai ? Roooh merci alors.
Gilda et son strip tease de gants, c’est tellement hot et sensuel. Ne rien montrer, juste suggérer … ♥
@ Jos : Une bien triste réalité… Une bien triste histoire. Et tellement, tellement le reflet de notre société !
@Valérie : arghhh… connexion coupée, je réécris 😉 on n’est jamais content de ce que l’on a souvent et l’herbe semble toujours plus verte ailleurs… Heureusement que la vie nous permet un jour de nous émanciper et de vivre comme on le souhaite vraiment, ou pas… Bravo pour ton texte !
Merci Nady. Puis heureusement pour elle.En espérant que ses enfants auront plus de chance.
@Terjit : oups… démasqués par le mari jaloux! Tu sais faire monter la pression pas à pas jusqu’à la chute fatale.bravo
@ Anselme :
Le top du top : quand un lieu déjà chargé d’histoires se remplit d’autres histoires grâce aux objets chinés dans les brocantes … J’ai chez moi une vieille cantine. Il n’y a que moi qui ai le droit de l’ouvrir.
Joli texte. J’aime aussi ces lieux comme Delphes (par exemple), où les vibrations telluriques sont d’un haut niveau.
Toujours eu un gros faible pour les vieilles pierres. (Tu me diras, je n’aurais pas fait ces études là sinon … 😉 )
@ Claude : Ah ah tu as gardé ton idée de l’araignée, mais fichtrement bien tournée ton histoire ! Elle colle à l’actu ! (tu fais du Nady style ? 😛 )
@ Nady : Ah si Camille Claudel n’était pas allée au bout de sa folie, au bout du bout, aurait-elle été Camille ?
Une très jolie transposition dans notre univers contemporain … Des affres de l’amour avec un style familier qui colle à la rage que Camille fait passer.
Très bien vu, incisif, on y croit terriblement. Bravo.
Arghhh, commentaire non publié car ai pris trop de temps à l’écrire… je recommence et recopie, au cas où 😉 Merci miss pour ton retour.
Pour répondre à ta question : si elle n’avait pas été internée 30 ans à cause d’une grave dépression (Camille n’a jamais été folle 😉 ) , elle aurait été encore plus grande et certainement reconnue de son vivant, et elle aurait été une autre Camille. Je pense que je l’aurais toujours adorée, tant par son génie dans la sculpture et son côté féminisme et j’aurais moins déploré sa déchéance qui me révolte 😉
Même dans sa déchéance, elle me fascine … Depuis pfiuuu … depuis que je suis tombée sur une de ses citations lors d’une expo en 2000 ? Cela remonte.
@ Isabelle : Hu hu joli clin d’oeil à cette prof de latin tyrannique qui fait apprendre les adjectifs de la 2è classe avec toutes les particularités et irrégularités ! (Certains – en grand nombre – ont eu 20. Yipida !)
Bon, plus sérieusement … Suis ravie que ta japonaise quitte les lieux. Une jolie métamorphose l’attend, une fois délivrée d’un poids certain. 🙂
@ Jos : Joli travail sur le point de vue de la photographie.
Je me souviens encore de cette histoire de « subprimes », oui … terrible.
@ Val : Eh bien triste vie dis moi … Le texte fait l’impasse sur comment elle a pu gérer cette solitude. Mais c’est bien. Au lecteur de combler les blancs.
@ Terjit : Tchac tchac ! Efficace ton texte ! Description clinique, aseptisée : comme ce personnage qui abat ce couple illégitime de sans froid. Ouch ! 😮
(Jusqu’au bout, et au dernier geste de la tête qui se relève … eh bien, dis moi … suis sans voix. On s’immerge très bien dans l’espace.)
@ Adèle : Ah ah, punaise, tu m’as eue (chapeau pointu !) Tu m’aurais vue à la lecture, je me disais « mais qu’est-ce donc ? ». 😀
@ Leiloona : j’adore ton texte. J’aimerais bien être celui qui raconte à sa compagne une nouvelle vie tous les matins ; ce doit être bien et adaptable aux circonstances. En plus, comme d’habitude tu écris fort bien et tu mentionnes opportunément Xenakis qui a bousculé mon adolescence attardée à la fin des années 60.
Oh merci Claude !
Alors tu vois, je suis certaine que tu fais partie de ces personnes qui savent donner du piment au quotidien. Je commence un peu à te connaître ! 😉
Xenakis, oh mon dieu … tu aimes ???? #effroi
Je n’écoute plus Xenakis… Quant au piment du quotidien, toi même en donne aux autres à travers ton blog et ton atelier. Et j’en profite… Et je ne regrette pas que tu commences à me connaître un peu !
Oh, merci !
Profite, profite, l’atelier est fait pour ça !
(Et moi aussi suis contente de te connaître un peu plus à chaque fois.)
@ Anselme : tu dis très bien ce que j’ai ressenti en voyant la photo. Pas d’âme dans cet appartement uniquement bon pour les crimes, rien qui fait rêver. Et cette vue plongeante qui bride toute inspiration.
& Nady : Bravo Nady pour cette transposition d’Auguste et Camille à nos jours et à notre actualité. J’adore l’oeuvre de Camille Claudel et son parcours m’a toujours ému. Merci pour ce superbe texte encore plein de ta sensibilité.
@ Isabelle : Ton couple en lui-même crée un désordre. C’est vraiment bien vu ce rapport d’opposition, surtout en présentant la japonaise bordélique à l’encontre des idées reçues. Bravo.
@ Terjit : Bravo. Vue la photo, je m’attendais à un crime dans un texte… Mais le tien est génial. Il est progressif comme dans un bon polar et superbement écrit. Merci.
@ Jos : tu racontes bien ce que beaucoup de gens ont dû vivre. Rien de pire qu’un rêve qui s’écroule pour des raisons aussi bassement économiques.
@ Adèle : A la chute de ton texte, j’ai tout relu, et ai eu un surplus d’affection pour ta maman araignée. Bravo.
@ Val : Ton texte redonne une âme à cette maison qui, a priori n’en a pas. Chaque lieu a une histoire et tu as su en raconter une. Merci.
Merci Claude.
@Isabelle : j’aime bien l’idée de marier la carpe et le lapin, pour former un couple plutôt heureux. Car on se nourrit de nos différences, non ?
Drôle aussi, l’idée du fantôme qui a une tâche a accomplir sur Terre.
Triste l’envol de Mitsouko, désemparée par la perte de sa moitié.
Que tous deux trouvent la sérénité dans leur monde.
@Jos : J’ai pensé au roman « Il était une ville » de Reverdy. Tristesse d’un rêve qui s’écroule, mais quand même, quelque chose de perenne a été construit : une famille. Et ça c’est beau et essentiel !
@Val : triste enfance quand il semble que l’existence d’une enfant ait moins de valeur aux yeux de sa mère qu’un meuble !
Pas sur que celle-ci soit une maniaco-dépressive, plutot une obsessionnelle.
Heureusement sa fille réussit à se construire et à exister par elle-même. Belle résilience !
Merci Adèle, oui heureusement.
@Terjit :Diabolique ! La jalousie est-elle de l’amour ?
Bonjour à toutes et à tous du Portugal où je suis venue rendre visite à ma belle famille. Je ne vais pas pouvoir commenter vos textes cette semaine (mais promis je vais les lire). Merci à tous pour vos commentaires. Je vous envoie le soleil du Portugal et toute la gentillesse et le naturel des Portugais. 🙂
Merci Jos et profite bien du Portugal !!
Jos : Enjoy ! ♥
Je ne connais pas encore le nord du Portugal … juste Faro et Madeira … d’excellents souvenirs ! ♥
@Adele : Ca commence gentillement puis j’ai craint le pire jusqu’à la dernière phrase.tu as su faire monter la pression.bravo
@Isabelle : brrrr pas sûr de vouloir premièrement un mari comme Edouard, deuxièmement un fantôme comme Edouard. Je souhaite bien du courage à cette nouvelle famille et une belle renaissance à Mitsouko malgré le poids de la perte.
@Jos : cela semble si loin la crise des subprimes et pourtant elle laisse des traces ineffaçables ..
@Val : l’argent ne fait pas le bonheur, ton texte le démontre parfaitement. Quelle triste enfance pour ton héroïne ! On ressent le lourd poids du passé encore présent dans son cœur. Néanmoins, elle a su s’affranchir de cette vie là pour mener celle qu’elle a voulu et qu’elle a désormais.
@Terjit : outch sacré vengeance pour ce couple illégitime. Agatha Christie disait « La jalousie engendre le Mal […] » rien n’est plus vrai lorsqu’on lit ce texte.
En tout cas, chaque semaine lorsque je te lis je suis toujours surprise par ta créativité. Tu réussis avec brio à me faire entrer dans ton univers et à me tenir en haleine jusqu’au dernier moment ! Bravo !
@Adèle : Alors là je ne m’y attendais pas. Si j’ai fini par comprendre qu’il ne s’agissait pas d’une femme, je n’arrive pas le moins du monde à deviner ce qui pouvait bien se cacher derrière cette grossesse. Bravo !
@Leiloona : être amnésique pour oublier son âge, quel bonheur que je vis depuis 2 ans en souhaitant chaque année le même anniversaire, pour combattre le temps. Je ne suis cependant pas parvenu au même point quelle qui arrive à « jouer cette comédie » jusqu’au bout, mais j’imagine sans peine son bonheur d’y parvenir. Merci Leiloona pour ce magnifique texte.
@Anselme : comme je suis d’accord avec toi ! Cette maison est froide, sans imagination, sans tous ces trucs et ces machins qui font un lieu de vie. Ecrivain ou pas : impossible de « se projeter ici, même pour un prix de X€ net vendeur » comme dirait le grand manitou télévisuel du bon goût immobilier 🙂
@Claude : le regard de l’araignée ! Bravo ! Et oui, travailler quand cela devient une fin en soi… quelle connerie ! Elle au moins elle tisse sa toile lentement, patiemment, à la sueur de son front (bien que je ne sais pas si les araignées transpirent…), mais pour en faire le « chez elle » et en profiter.
@Nady : Camille te poursuit en ce moment… comme je te comprends ! On peu dire de ton texte qu’il est beau mais c’est banal, ou qu’il est fort mais quand l’un quitte l’autre ça l’est toujours, j’ai juste envie de dire qu’il m’a fait du bien !
@Isabelle : enfin un peu de vie dans cet univers vide de sens ! j’adore la visite à la foire de paris au rayon produits d’entretien : quel cauchemar !!!
Ah ah … m’enfin on se fiche de l’âge non ? Seul compte l’esprit.
Merci Terjit ! 🙂 (tu me diras, tu fais des économies sur les bougies ! 😛 )
😉 touchée par ton retour je suis 😉 merci, tout simplement 😉