Le coeur battant de nos mères, Brit Bennett

Chez elle, la perte était omniprésente, elle avait du mal à voir au-delà, c’était comme essayer de regarder par une fenêtre couverte d’empreintes de doigts. Elle se sentirait toujours prisonnière derrière cette vitre placée entre elle et le monde. Au moins à Ann Arbor, la vitre était plus propre.

Le Coeur battant de nos mères a tout du livre qui fonctionne en ce moment : court, rythmé, une héroïne en difficulté mais qui s’en sort à la force de son âme et de ses petits bras. Un peu de pathos, des questionnements sur le corps, la place de la femme dans la société, sur l’homme, sur les sentiments qui les mettent en branle. Pour ce qui est de l’écriture, pas mal de dialogue, il faut que ça aille vite, que ça pulse, que ça envoie.
Je les appelle les livres cinématographiques.

D’une structure parfaite pour être scénarisé (d’ailleurs le livre est en cours d’adaptation, et il fonctionnera j’en suis certaine), mon appétit de lectrice est restée sur sa faim. J’ai besoin de corps, de description, de langue travaillée, d’images, d’évasion littéraire. Je n’ai eu qu’un survol de thématiques porteuses. Quelques bonnes idées narratives toutefois (l’auteur a suivi des cours de creative writing, cela se sent.) comme ce choeur de femmes qui raconte l’événement à la manière du stasimon antique dans les tragédies grecques.

Il eût été intéressant de se pencher sur cette femme qui à l’orée de sa majorité avorte. Il y a tant à dire sur ce corps qui ne nous appartient plus, sur ces miroirs de chemins qui se brisent, sur les « et si ? » qui se mettent en branle jusqu’à la fin de notre vie, sur ces regards qu’on porte sur les femmes enceintes. Tout simplement sur ce maelström d’émotions qui ne se tarit jamais. A la place, j’ai eu un saupoudrage gentillet. Je suis restée à la surface, éloignée de ces destins qui ne peuvent s’élever depuis cet événement marquant.

L’écart entre la 4è de couverture qui compare Brit Bennett à Chimamanda Adichie fut trop grand sans doute. La déception est là en tout cas. Cela dit, ce premier roman a trouvé son lectorat, puisqu’il figure dans les meilleures ventes de livres aux USA.

En lice pour le Grand Prix des Lectrices Elle.

Mes échappées livresques : Une lecture sur l’avortement, la filiation et la culpabilité qui est restée trop fade à mon goût.

18 comments

  1. Stephie says:

    Autant de romans que de lectrices 🙂 ce fut pour moi une très belle découverte ! J’ai eu les larmes aux yeux plus d’une fois

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    • Leiloona says:

      Je n’y ai pas cru une seconde … Oui, comme tu dis, autant d’avis que de lecteurs. Et le livre a trouvé son lectorat vu ses ventes outre atlantique.

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    • Leiloona says:

      Oui et là entre Ferrante et Chimamanda Adichie (en gros de belles ventes mondiales) orientent mal le lecteur car ces références créent une attente immense. Alors certes, l’auteur est noire, elle donne la parole à une femme qui s’en sort grâce à son tempérament, mais pour le reste (l’écriture) cela est bien en deçà.

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  2. Jostein says:

    Je n’ai pas aimé le premier tome de Ferrante, un peu déçue par le Adichie.
    Cinématographique, sans aucun doute.
    Maintenant, oui, on peut toujours aller davantage en profondeur mais les images et les « et si? » sont là, les corps, les destins brisés sont là. Même, ce qui est rare, il y a la vision du futur père.
    Maintenant, je suis d’accord, la langue et certains passages auraient pu être davantage travaillés et nous sommes davantage sur le réel que l’évasion. Mais c’est un premier roman.

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    • Leiloona says:

      Jostein : Oh je sens à la lecture de ton commentaire que mon billet t’a agacée. Eh bien, je crois que c’est une affaire de ressentis. Je n’ai pas adhéré à l’héroïne, à ces ingrédients qui font que cette littérature fonctionne. J’aime plutôt l’originalité, être surprise, et conquise. Là, j’avais (selon moi toujours) le côté larmichette avec cette fille qui s’en sort malgré le destin, mais raconté avec un manque de délicatesse.
      Je n’aime pas les ficelles, ou ce que je pense en être. Après aimer ou pas un roman, oui, c’est une affaire de ressentis. Et là chez moi ce fut l’encéphalogramme plat.

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  3. valmleslivres says:

    Une déception pour moi aussi, un peu trop superficiel peut-être.
    J’ai bien reçu mes places pour Plonger, encore merci pour ce concours!

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  4. framboise says:

    Je vais passer mon chemin, et pourtant le sujet …. Bref, vais lire autre chose koa !
    Des bises poulette <3

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Commentaire :

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