Atelier d’écriture journalier : tous le monde peut participer, il suffit de publier le texte dans les commentaires.
Afin de rendre l’exercice plus convivial, n’hésitez pas à commenter les autres textes.
A demain pour une nouvelle photographie
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Façonnage
Je façonne…
Je façonne à ma façon
Mais je façonne,
Un pot de terre
Un pot de vie
Un peu de vie
Dans ma prison
Sans air, sans mer, sans pairs.
Je façonne pour ne plus penser
Que je suis enfermée
Je façonne, tu façonnes, nous façonnons
Séparément, mais chacun reliés
Les uns aux autres par cette glaise
Par cette terre qui nous a tout donné.
MH
j’adore ton texte ! nous avons été un peu dans la même idée mais quel kiffe ta poésie !! Merci Marinade d’histoires 😉
Oh, merci Nady !
C’est super beau, ça colle à la photo et ça colle à nos vies, de maintenant, merci à toi
Merci Janick !
C’est chouette !
Merci Matatoune
La délicatesse de ton poème m’a touché. bravo MH !
Merci Kroum !
Très beau. De plus cette progression dans le nombre de pieds de la première à la dernière ligne donne une musique particulière.
Oh, merci Cloud, c’est un beau compliment !
C était toujours la même sensation… Il suffisait qu il entre dans son atelier pour que tout le reste s efface…
Un peu comme lorsqu une respiration de la brise vient arracher votre chapeau, on se sent tout à coup plus léger.
Là, dans son univers, dans son antre, dans sa grotte, il pouvait refaçonner le monde à sa façon. Les hommes n’ avaient plus forcément deux bras, ni les animaux quatre pattes. Destructurer, recomposer, accumuler, déchirer, c était l’essence de son art. Aller chercher la petite bête. Le bonheur se loge dans les détails. Fignoler, reprendre, détourner, lisser, froisser, pétrir, modeler, sentir la glaise s’échapper sous ses doigts ou obéir à sa caresse. Une lutte silencieuse pour la contraindre, la plier, la soumettre et qu enfin elle exprime son idée, qu elle soit, au delà du travail des mains, une extravagance de son esprit, la représentation de sa chimère. Alors, enfin, il pouvait lâcher l affaire, rendre son tablier et laisser son œuvre parler pour lui, exprimer son impuissance mais aussi sa fascination devant la laideur, l’ incongru, le politiquement incorrect. En montrant aux autres ces créatures, il donnait à voir l’ improbable, l’inattendu, le surnaturel. C était pourtant sa façon d’expier sa colère face à l injustice du ciel, de montrer qu’il ne se laisserait pas faire, qu’il se battrait: lui aussi il pouvait créer et pas seulement du beau, c’était trop facile le beau, il suffisait d’observation et de minutie pour reproduire. Inventer du laid c’était être aussi fort que le Puissant, dialoguer sur un terrain d égalité. Puisque le mal s’était glissé en lui pour tenter de l’abattre, il lui fallait bien trouver une riposte ! Finalement, contrairement à toute attente, il ne représentait pas des idées tordues qui habitaient son âme, non ! Il extirpait de lui même le mal qui l’habitait. Sans se le dire vraiment, l’idée maîtresse était que plus son être vomirait l’horrible, moins il en serait victime. Il réussirait ce combat et sortirait vainqueur de cette maladie qui rognait sa vie.
Mais midi sonnait au clocher. Il fallait retrouver son apparence présentable, se laver les mains pour se débarrasser de l’argile mais aussi retrouver le sourire et même si possible faire pétiller le regard. A la table du repas, nul ne devrait soupçonner le combat de la matinée. L homme enjoué que chacun appréciait pour son humour et sa bienveillance prendrait place au bout de table pour rassurer sa famille. Leur dire silencieusement qu il était là pour eux. Sans les mots mais par l’attitude, il leur manifesterait encore qu ils pouvaient s’appuyer sur lui. Chacun avait ses viscicitudes, il n’était pas encore temps de les distraire de leurs vies, de les bouleverser par une annonce fracassante. D’autant qu’il n avait pas encore lâché l’affaire, qui sait ? La médecine avait ses failles, les docteurs pouvaient se tromper. Il allait gagner la bataille. Quand tout serait terminé, il recommencerait à sculpter des fleurs, des beaux visages, de l édulcoré, du joli, pour plaire et baigner dans l apaisement. Les critiques étonnés parleraient d une nouvelle phase créatrice et de la nécessité mercantile de surprendre le marché de l’art. Mais lui il saurait !
Juste un mot : SUBLIME ! J’ai lu votre texte dans un souffle et j’avoue que j’ai été très séduite par les idées qui s’en dégageaient, non, vraiment conquise même tellement tout me parle ! Tout me plut et ce passage en particulier : « l’idée maîtresse était que plus son être vomirait l’horrible, moins il en serait victime. Il réussirait ce combat et sortirait vainqueur de cette maladie qui rognait sa vie. » mais en fait, en y repensant, tout votre texte est juste magnifique et si vrai ! Merci pour ce beau cadeau de lecture !
Magnifique ! Merci pour ce moment de lecture. pas très optimiste pour le présent, mais porteur de tant d’espoirs de retrouver le beau !
Il mène un beau combat, avec grâce et élégance, même si la noirceur parfois l’envahit, et ce beau combat nous offre un texte fort, lu en une seule fois, d’un trait … de génie !
Merci à tous pour vos encouragements
Une très jolie prose. Bravo perez !
Vraiment bien. Le texte montre bien cette intimité entre l’artiste et l’oeuvre. La notion de beau et de laid devient ambigüe dès lors qu’il s’agit d’une oeuvre d’art. La création est une beauté en soi. Bravo et merci.
Aujourd’hui c’est atelier poterie collectif dans cette période inédite de confinement. Tout le monde est arrivé ? Tout le monde a bien son matériel ? Tout le monde est bien installé ?
Alors on va pouvoir commencer.
Tout d’abord, je vous propose qu’on se mette dans une ambiance de création, comme le fait tout artiste qui se respecte. Et en même temps on révisera notre conjugaison.
Allez, tous avec moi. On inspire et on expire trois fois. On ferme les yeux et on conjugue à haute voix l’expression suivante : « être dans un pays en paix ».
Tout le monde est prêt ? On y va.
Je suis dans un pays en paix.
Tu es dans un pays en paix.
Il ou elle est dans un pays en paix.
Nous sommes dans un pays en paix.
Vous êtes dans un pays en paix.
Ils ou elles sont dans un pays en paix.
Bon, je vous entends mal, soyez moins timides dans la création ! Il faut que notre œuvre ait de la gueule pour qu’on la remarque. Il faut oser sortir de nos zones de confort ; il faut voir grand pour que tout le monde puisse apercevoir la moindre partie de l’œuvre que nous allons créer.
Aujourd’hui nous allons commencer par l’étape de malaxage de la terre entre nos mains afin de lui donner une bonne consistance et faciliter le façonnage. Cette étape est la plus longue mais la plus importante car c’est avec cette base que nous pourrons créer par la suite avec plus ou moins de facilité. Et comme vous le savez, notre œuvre sera collective mais nos terres différentes car propres à chacun de nous.
Allez, on va y aller, chacun de notre côté, tout le monde est capable de malaxer la terre. Pour le tournage qui demande plus de métier, certains d’entre nous ont été désignés mais pour tous ceux et celles qui veulent aussi se lancer, les places sont illimitées.
Au fait, j’ai oublié le principal, vous donner le thème de notre œuvre collective… Où ai-je la tête ? Vous êtes si nombreux que j’ai oublié de commencer par le début. Alors le voici : « construire un monde en paix ». On le conjugue ensemble pendant le malaxage de nos terres ?
Bonne idée. Il y a plein de bonnes idées en ce moment. Plein de bonnes intentions. J’attends la sortie de crise pour voir où seront les belles propositions. Il y a des poissons dans l’eau transparente de venise ? Super ! Mais dix jours après la sortie, les immenses bateaux qui dégueulent de touristes vont revenir. C’est certain.
Ton textes est plein de jolies choses, Nady. J’attends un mois pour voir ce que les hommes en feraont.
wait and see… De mon côté je reste confiante, il en restera quelque chose qu’on continuera, c’est obligé, le choc fut tellement fort ! sinon, cela signifiera qu’on n’aura rien compris à cette leçon de vie… Merci pour ta lecture
Je ne suis pas sûr qu’on aura compris… Je ne suis pas optimiste…
c’est toute la magie de notre monde d’avoir des êtres différents. Qui vivra verra 😉
Un très beau texte qui donne de l’espoir, mais l’homme est-il assez sage pour apprendre de ses erreurs et faire différemment quand le virus sera passé…
merci de ta lecture 😉 j’ose espérer que l’Homme apprendra de ses blessures mais une partie de l’Humanité changera, je le vois déjà et je les suis avec grand plaisir dans ces nouveaux sentiers 😉 belle journée à toi !
Oui, nous sommes là ! Ce texte te va si bien, il aurait pu être le prologue du texte de Perez, une continuité.
Merci ma belle amie. Oh un beau compliment mais y a du niveau quand même chez Perez. Elle doit être écrivaine car sa plume est juste divine, recherchée et d’une grande fluidité 😉 belle fin de semaine à toi, bises bises,
Même si on n’y arrivera pas, notre intention était là. Merci
une partie est en chemin pour cette nouvelle construction, il y aura un résultat, même petit mais il existera 😉 Merci beaucoup pour ta lecture 😉
Bravo Nady. C’est réellement un beau texte que tu nous proposes. Tu y as mis du leadership et de la dynamique de groupe. La cause est noble, le message optimiste. Je reconnais ton enthousiasme. René Dumont avait écrit un livre dans les années 70 dont le titre était « L’utopie ou la mort »…
oh merci Claude pour ton retour de lecture qui m’interpelle car visiblement on ressent mon quotidien même dans l’écrit le plus léger que j’ai pu faire 😉 je suis en train d’apprendre à fédérer en pro une équipe autour d’un projet à distance et ce n’est vraiment pas évident à tel point que ça transpire dans mes lignes pendant mon hobby d’écriture lol bisous, je note ton livre dans ma to read list, même s’il me manque du temps pour lire à volonté…
Ah ! Il est bien loin le temps où il pouvait monter de longs cols de vases. Bien longs, bien verticaux, tendus vers le ciel. Un simple regard sur la terre argileuse. Un simple coup de doigt sur la base de la boule de glaise et tout suivait, sans qu’il n’ait rien à faire. Presque uniquement par la pensée. Le col montait tout seul. Sous ses yeux heureux. Il n’y avait plus qu’à le mettre au four et le tour était joué. Le potier était heureux. Son épouse aussi. Elle aimait ses grands vases.
Les années ont passé. Et le geste est moins précis. Il y a toujours le savoir-faire, certes, mais la terre ne réagit plus comme elle le faisait avant. Elle est moins réactive sous le doigt qui la travaille. Les vases sont devenus plus souples, plus courts. Il a fallu adopter un autre style. Se faire aider par un moteur auxiliaire. Parfois, il regarde la pauvre chose qu’il a réussie à ériger et se dit que ça ne vaut même pas la peine de le mettre au four.
Le potier arrête son tour. « Viens, dit-il à sa femme, ils jouent Ghost ce soir sur la 6. Je ne sais pas pourquoi, mais j’adore ce film. »
Trop mimi et émouvant ton texte. J’aime le ton différent sur les 2 parties.
Il passe son tour, et tentera autre chose la prochaine fois, je le lui souhaite !
Ce texte est beau parce qu’il est tendre et réaliste à la fois. Il en est ainsi de nombreux artistes. Peu à peu on adapte l’oeuvre à ses capacités. L’essentiel est de ne jamais ranger définitivement ses outils.
Jour 9
Son corps nu s’arc-boute au-dessus de la vapeur du bain.
Elle saisit les bords de la baignoire, teste la température de la pointe des pieds, lentement, plie les genoux et son corps docile se recouvre d’eau parfumée au thé vert, d’innombrables sachets de thé flottent à la surface du bain, recueillis à l’heure du goûter et entassés dans un grand flacon.
Elle se fout de la guerre, et ne parvient plus à digérer la rugosité des informations distillées au lance-roquette, salves incessantes et destructrices de sérotonine.
Elle reste chez elle, et personne ne passera, et personne ne viendra lui dire, ce qu’elle fait dans son bain au milieu de l’après-midi.
Le diffuseur d’huiles essentielles en poterie haïku, laisse flotter le ravintsara au-dessus du bain, elle retournera, peut-être dans un mois chez ce potier, infiniment doué.
Tellement réaliste ! J’adore
La tranquillité et la liberté, conséquences imprévues du confinement ! Un beau texte plein de quiétude.
Ton texte donne envie de se glisser dans son bain avec elle, en pleine après-midi. Bravo Janickmm !
Que c’est beau ! J’adore cette lenteur, ce détachement, cette totale liberté qui s’en dégagent. Bravo.
Modeler
Modeler sa vie son goût, son couple en visitant des expositions de céramique ,de poterie , de sculpture, de peinture, des bibliothèques, des librairies etc. ,ensemble. Partir de la terre et de l’eau, jouer avec le feu pour atteindre au sublime d’un couple volant au dessus des paysages comme dans les tableaux de Chagall . C’est ce que nous avons fait et ce ne sont pas des souvenirs comme ton circuit de trains miniatures n’est pas un souvenir. Ce sont des constructions . Nous avons bâti notre vie; comment peuvent-ils croire que je détruirais ces constructions, en t’oubliant au bout de cinq mois?
26 MARS 2020
Pour commencer.. une petite chanson
Laisse mes mains
sur tes hanches
chantait Adamo
mais non !!
pose les ailleurs !
Tiens pourquoi pas
sur de la terre..
du jardin !
Désherbe plutôt,
plante,
déplante
replante,
traque la plus petite brindille
donne de l’air
de l’espace
du champ
aux hortensias
pour que l’azalée
enfin trouve sa place.
Ne me quitte pas
dit l’autre..
mais si, quitte moi
lâche moi
va tripoter
la terre
l’argile
mouillée
par tes mains
tes doigts
tes paumes
fais naître un autre moi
un moi
imperméable
imputrescible
immaculé
sans péché
sans défaut
sans..
Non, je ne l’ai pas dit
mais quitte moi
ne mets pas tes mains
sur mes hanches
lave les
bien comme il faut !
Ce poème-chanson sonne un peu comme un ras le bol de devoir supporter l’autre, bien vu !
Un texte comme un cri de lassitude. Il est rythmé, voire saccadé. Il est beau et convaincant pour un mec collant…
Ses caresses lui effleuraient
la peau avec une tendresse insensée.
Son corps vibrait, ici et là,
maintenant, sans aucun son….
Enfin si, juste celui de ses mains
parcourant le long de son dos tout doucement.
Et soudain, des petits cris épars,
en signe de satisfaction partagée
en ce doux moment.
Un bonheur d’être mariée à un potier aimant.
Et ici ce n’est pourtant pas commun.
Beaucoup de ses amies rêvent de s’unir à un kiné,
car ils sont soi-disant plus beaux.
Quelle sensualité…
Tout simplement, … ses caresses doivent être magiques !
Quel bel hymne aux kiné !!!!
Superbe et plein de sensualité. L’idée est excellent et la réalisation à la hauteur. Bravo.
Quand de sortie tu es privé
D’air pur tu ne peux que rêver
De rencontres tu es dispensé
Au shopping tu ne peux plus aller
Quand tes aînés tu dois protéger
Sans pour autant les oublier
Quand au nécessaire tu dois penser
Et le superflu oublier
Quand le quotidien t’offre cette pause
Quoi de mieux que de créer ?
Avec tes mains, avec tes idées
Juste laisser ton esprit s’évader
Pour quelques heures ou une journée
Et en faire profiter ceux avec qui
Tu peux encore communiquer…
La création, le partage, sans doute liés à l’ennui et l’obligation de devoir être confinés.
Un poème qui décrit à merveille ce que nous vivons tous dans le monde. Bravo titounette!
Tellement juste ! Merci
Beau message en vers qui résume bien le sentiment de beaucoup, dont les participants à cet atelier.
Pour rejoindre la maison de Lucien, il suffisait de quitter la route principale, passer le petit pont et monter la pente sinueuse qui débouchait au cœur du village. En arrivant, les calades, ces pierres de lave sculptées au murs des maisons, faisait avancer les enfants des touristes. Il fallait traverser une place magnifique et laisser le terrain de boules pour s’engager dans une ruelle qui descendait à la plage de la rivière fréquentée les jours de canicule. La maison était là sur une toute petite placette. Du haut de ses trois étages, elle dominait simple et rustique. Lucien travaillait de ses mains l’argile d’Ardèche. Du matin au soir, il modelait des huiliers, des gratte-ails, des saladiers aux ventres ronds et des bols généreux. Il avait choisit l’utilitaire en grès pour donner chaque matin à celui qui le tient le goût de cette terre qu’il aimait tant. Les sonnettes de la porte rythmaient les journées de l’été lorsqu’on s’installait sur la placette pour profiter de l’ombre de la fin de journée. Un jour, Lucien est parti rejoindre dans le cimetière le grand Jeannot qui avait donné à cette région la plus belle des chansons. J’ai voulu acheter sa maison. Mais, les murs ont une âme et ceux-ci appartenaient au travail de la main. Homme de parole, je n’y avais pas ma place. Aujourd’hui, confiné, je pense à mon ami Lucien. Comment peut-on s’imaginer en voyant un vol d’hirondelles que le printemps vient d’arriver !
vagabondageautourdesoi.com
On ressent super bien l’atmosphère villageoise dans ton texte. ça fait un bien fou quand on est bloqué dans une grande ville. Merci.
Merci bcp ! J’ai voulu, c’est vrai, pouvoir donner de l’espace à notre confinement…
j’ai beaucoup aimé la description du village. On y était presque et ça donne même envie d’aller le visiter après le confinement. Merci pour ce beau moment de lecture.
Alors, oui il faut y aller car vraiment, il est très agréable
il faudra me donner l’adresse et je réserverai asap 😉
J’aime beaucoup cette description d’un village ardéchois. On y est. On n’est pas loin des descriptions des Cévennes par Jean Pierre Chabrol avec ses personnages attachants. On aimerait en lire plus. La chute est une constatation bien triste, même pour un parisien confiné qui voit peu d’hirondelles en temps ordinaire.
Christophe était potier à Cronalec sur Mer. Ce métier étant rare dans ce pays granitique, il avait été approché par le conseil municipal pour établir son atelier près du haut lieu touristique du village : la masure où habitait Marcel, le pêcheur sculpteur devenu célèbre de manière posthume pour ses totems en bois, références incontournable de l’art brut.
Ainsi, pendant de longues années, Christophe avait passé ses journées à façonner des assiettes, des cendriers, des cruches à destination des nombreux touristes. Afin d’appâter le client, il ajoutait aux objets des motifs colorés, des torsades, des reliefs de roses, des grappes de raisins. Sur chaque pièce il inscrivait à la peinture avec une écriture volontairement enfantine : « Souvenir de Cronalec sur Mer , cité de l’art brut». La lassitude s’était vite ressentie, car ce travail routinier ne présentait aucun intérêt, sinon financier.
Dieu merci, des évènements inattendus avaient précipité la fin de cette galère. Car, rappelons-nous, ce village prospère avait subi un revers de taille suite à la destruction des œuvres de Marcel, résultat semble t-il d’une malédiction, à en croire certains habitants. Les touristes, qui arrivaient par hordes, ne venant plus, la population était partie, à part quelques rares irréductibles comme Christophe. Une poignée d’artistes et de poètes inconnus, et cherchant à le rester, avait par la suite investi les maisons devenues accessibles. La vie était devenue enfin paisible à Cronalec sur Mer.
Christophe s’était alors mis à réaliser des œuvres personnelles, aux lignes pures, fines sans décoration. Il les rehaussait d’un bleu turquoise leur donnant un côté zen. Les clients étaient rares, mais son existence heureuse.
Un jour, une femme entra dans son atelier. Elle resta un bon moment à regarder une à une chaque pièce, les prenant délicatement dans sa main pour les observer, les caresser. Une seule parole revenait régulièrement à sa bouche : « Quelle élégance ! ». Christophe n’avait entendu toutes ces dernières années pour seuls leitmotivs : « C’est combien ? », « May I take a picture ? », « On peut faire un selfie ? »… Il ferma les yeux, esquissa un sourire de plaisir, et se dit en lui-même :
« Elle a dit « élégance » ? C’est bien la première fois que j’entends ce mot adressé à mes œuvres ».
ton texte semble une suite de celui de matatoune et du tien d’hier. Ton humour est toujours là et me ravit. J’ai adoré : » Une poignée d’artistes et de poètes inconnus, et cherchant à le rester, » et la chute bien sûr 😉 tu crois qu’une belle histoire romantique va avoir lieu entre ces 2 là ? bisous Claude
Moi j’en suis sûre à 200%. Je parie et suis sûre de gagner
hihihi moi aussi j’y crois 😉
@Alexandra : Tu as mis jour 9 alors que c’était le 10…(comme il manquait un jour) Donc aujourd’hui c’est Jour 11. Belle journée.
Hello les zamis d’écriture, avec un déclic de retard ou un d’avance je vous propose mon petit texte.
» Il sentit glisser l’argile entre ses mains.
Ce doux mélange de terre et d’eau.
Il ferma les yeux et se laissa aux sensations…
Celles de la peau douce et chaude de son amour perdu,
Celles du sable et du soleil au bord de la mer évaporés
Sensations d’un temps où tout lui souriait
Mais tourne le tour,
Cette argile était là sous ses mains pour tout reconstruire
Comme on remonte le courant
Comme on se prend des échardes et des coups de griffes
Il refaçonnerait ce corps encore et encore
Et donnerait corps et cœur à ses sensations.
Portez-vous bien, prenez soin de vous.
Bises
Dans la mythologie argileuse, le potier attend son tour.
Il y a très, très, très, très longtemps, il était le véritable créateur. Par l’argile et l’eau, il façonnait les Hommes depuis des siècles et des siècles. Dieu n’avait plus qu’à leur donner vie. C’était ainsi !
Alors comme chaque matin, le potier ouvrit son atelier. Une nouvelle fois ici et aujourd’hui, des Hommes allaient sortir de terre.
Mais à peine la porte ouverte il découvrit que sa tour, son outil de travail, l’objet de toute sa vie n’était plus là. A la place se dressaient deux gardiens des cieux. Personnages dociles et messagers du Dieu.
– Ne t’inquiètes pas petit homme (les gardiens des cieux sont souvent condescendants !).
Le potier apprit que sa tour avait été emmenée à la droite de Dieu et qu’il devait lui aussi s’y rendre.
Une fois sur place, le Dieu s’adressa à l’artisan :
– depuis des années et des années tu mets en forme les Hommes. Cher potier, je souhaiterais qu’ici et aujourd’hui, de tes mains expertes, naisse la plus belle des créatures. Tu as 6 semaines ! (texte écrit au temps du confinement !).
Alors, il se mit rapidement au travail et fit tourner sa tour à entraînement par le pied. Les gestes sont précis, efficaces. Le tout est manié avec dextérité et grâce.
Petit à petit le morceau d’argile pris ses formes. Ce qui n’était que de la terre devint chair sous les doigts agiles du petit homme. Sous les yeux ébahis du Dieu, se dessinait, petit à petit, un corps aux courbes parfaites, allongées. Magnifiquement proportionné. Un corps d’une grande beauté. Le potier s’était surpassé. Il n’y avait pas sur terre pareille personne.
Après avoir tant façonné d’hommes, l’artisan créateur venait de façonner…une femme ! Dieu en tomba littéralement amoureux.
Alors il se leva et félicita le potier et dans un bruit assourdissant déclencha une avalanche d’éclairs qui vinrent détruire la tour infernale. Son outil de travail, l’objet de toute sa vie.
Le petit homme, chancelant et abasourdit de voir ainsi son matériel pulvérisé ne vit pas le coup venir. Dieu lui décrocha la foudre en plein cœur. Le potier tomba au sol, mort.
Le Dieu ne voulut pas se contenter d’avoir une femme parfaite à ses côtés. Il la voulait aussi, unique.
Ils vécurent heureux (paraît-il !).
C’est pourquoi depuis ces temps reculés, les potiers ne font plus les Hommes mais des pots et de vases. C’est beaucoup moins dangereux !
Dans la mythologie argileuse, le potier attend son tour.
Un jour, j’étais dans mon atelier, à modeler de la terre glaise. C’était il y a déjà longtemps, juste avant que je me mette à sculpter ; c’était une époque où on parlait peu aux enfants, et souvent faux. Pour les protéger du grand méchant monde. Ou peut-être pas.Peut-être était-ce juste notre mode de fonctionnement.
Toujours est-il que ce jour-là, assise devant mon tour, j’ai sorti un vase si réussi que même ma toute petite fille de trois ans en était restée muette d’admiration.
« C’est trop beau, maman », murmura-t-elle le souffle coupé
Et c’est là que j’ai dérapé. J’aurais pu dire « oui, n’est-ce pas, ma chérie ? », et rester là avec elle en silence à regarder les formes parfaites de mon œuvre. Mais non, j’ai tenté un parallèle hasardeux.
-« mais quand même, ma plus belle œuvre, c’est toi, ma chérie …
– ah bon ?
– oui, tu vois, un jour, j’ai eu très envie d’avoir une petite fille. Je l’avais si souvent rêvée, dessinée…je me suis dit que j’allais la fabriquer.
-c’était moi ?
-oui, c’était toi. J’ai pris la meilleure argile que j’ai pu trouver ; je l’ai modelée doucement, tendrement. La tête (et j’ai caressé le tour de son crâne), le torse (mes mains sont descendues sur ses petites côtes saillantes, le petit ventre »ma fille se mit à glousser, car je la chatouillais. Elle se laissa néanmoins faire, se blottissant contre moi, comme le soir quand je lui racontais une histoire
-une petite choupette…je continuais ma descente, passant rapidement sur la zone interdite
-tu n’aurais pas préféré un garçon ? s’inquiéta tout à coup la demoiselle.
-pas du tout, une petite princesse, c’est ce que je voulais
Après j’ai fait les petites jambes, des pieds tout petits, mais je n’ai pas oublié de faire les orteils avec leurs phalanges, leurs minuscules ongles…et je suis remontée, j’ai repris de la terre, j’ai faitles bras. C’est difficile, de faire les bras, il y a beaucoup d’articulations, les rattacher aux épaules, bien symétriques. Tout ça en tout petit, tu mesurais cinquante-deux centimètres quand tu es née !
-continue, dit ma fille, et après ?
Quand j’ai fini tout ton corps, devant, derrière, les petites fesses, le creux derrière les genoux, la forme des petits mollets sans muscles encore, on doit juste les deviner, eh bien j’ai fait tes oreilles, tes yeux, ton nez, ta bouche…et je picorais son adorable visage de plein de petits bisous.
Je n’avais plus beaucoup de terre, alors j’ai juste mis quelques cheveux, je me suis dit que ça pousserait plus tard. J’ai soufflé sur tes yeux pour qu’ils se mettent à voir, j’ai embrassé ta gorge pour que tu respires et parles. Et puis voilà, j’ai attendu neuf mois.
-eh ben dis donc, fut le bref commentaire que j’ai obtenu face à toute cette inventivité, toute cette tendresse ruisselante, dégoulinante. Mais que la maman qui n’a jamais connu des moments comme ça me jette la première pierre.
– et alors, après, comment j’ai pu sortir de ton ventre ? comment je suis rentrée dedans ? là le ton était carrément dubitatif, voire provocateur.
– euh euh…je ne savais plus vraiment quoi dire. J’aurais encore pu avouer que non, ça c’était juste un conte, comme on en invente pour les enfants, les choux, les roses, les cigognes… Mais je redoutais de devoir ensuite passer à des explications que je n’aurais su donner. Eh oui, en ce temps-là, c’était comme ça. Des tabous, des hontes, le totem religieux plus important que tout.
Ma fille lança tout d’un coup « tout ça tu inventes. Papa m’a déjà expliqué »
Quoi ? c’est vrai ? qu’est-ce qu’il t’a dit ? j’étais abasourdie, et soulagée, mais aussi en colère. On aurait au moins pu en discuter, elle n’avait que trois ans, quand même !
– Oh, ben il m’a dit que le papa plantait une graine dans le ventre de la maman, où il y avait aussi une graine (cool, il ne s’est pas attribué tout le mérite, c’est déjà ça)…les deux graines se collent et le bébé commence à se fabriquer. C’est prévu comme ça par la nature, c’est automatique en fait ! » dit doctement ma petite poupée. Ouah ! c’est vrai que j’aurais pu dire ça, au lieu de patauger dans la terre glaise…je priai mentalement pour que les explications de mon cher scientifique de mari se soient arrêtées là.Pour cacher ma gêne, j’ai machinalement repris de la terre, et j’ai commencé à la modeler
– Et c’est là que ma fille m’a regardé d’un air suspicieux
– – tu le savais, quand même ? elle n’avait pas encore la notion de mensonge, même si elle maîtrisait celle de la reproduction des mammifères.
– -euh euh…je recommençai à bafouiller. Mentir maintenant et passer pour stupide, moi qui étais pour l’instant le Dieu omniscient dans son esprit ? ou reconnaître avoir menti juste avant ?
– -parce que si tu le savais pas, pourquoi tu as laissé papa mettre son zizi dans ta choupette ? Le regard était sévère et comminatoire. Il fallait répondre.
– Euh, euh, parce que c’est rigolo, ça chatouille ? » ai-je hasardé, m’approchant de la vérité plus que je ne l’avais fait jusqu’alors
– Ma fille éclata de rire. « Toi alors, maman, tu es une blagueuse ! Tu dis n’importe quoi ! »
– Et, se désintéressant de la question, elle partit jouer avec ses lego.
– J’ai décidé ce jour de ne plus lui mentir, même si c’était pour « rire », même si c’était pour me faire bien voir, pour apparaître comme la personne toute-puissante dont le seul désir lui avait donné vie. De la respecter, elle, ses questions, formulées ou non, son intelligence et sa capacité émotionnelle. De plus j’étais là, son père aussi, pour l’aider à passer tous les caps, et c’était notre job.
– J’ai donc décidé de ne plus lui mentir, quelle que soit la question. Au pire un joker, le plus rarement possible. De ne pas chercher à la modeler, de ne pas m’ériger en « modèle » non plus, pour qu’elle puisse suivre son propre chemin. D’être là pour l’aider à sortir du carcan social qui m’enserrait, comme une gangue de pierre.
– Et je me suis mise à la sculpture.