Manuscrits de l’extrême : prison, passion, péril, possession


« Je crois que les mots ne sont pas sans importance. Je crois qu’ils sont notre cirque et notre dignité »

Jusqu’au 7 juillet se tient une exposition particulière à la BNF : les manuscrits écrits dans des conditions extrêmes.

Ecrire, c’est graver l’éphémère dans du marbre, c’est le rendre immortel. « Scripta manent », disait le sénateur romain. Dans cette exposition, il s’agit souvent des derniers mots, les « ultima ». Les manuscrits exposés sont tous atteints d’une certaine épure donnée par l’urgence de la situation, mais aussi par la lucidité de l’homme dans ces moments-là. Sans masque ni fioritures, il écrit l’essentiel. L’amour, la foi, la vie.

Vous qui entrez dans cette exposition, n’attendez aucune grandiloquence. On ne peut que s’incliner, être humble face à ces manuscrits. N’attendez pas non plus de manuscrits proprets et ordonnés. Morceaux d’étoffe, écorce d’arbre, lettres, mots gribouillés sur un agenda.

Ces manuscrits sont ces horloges qu’on arrête dans la maison d’un mort, le visiteur suspend son souffle, face à ces témoignages qui montrent que même (ou plutôt surtout) avant la mort (supposée ou réelle), l’homme retourne à l’écriture, il fixe ses derniers instants, afin que ses mots lui survivent un peu.

C’est cet appel de Marie-Antoinette, ce sont les mots de Guillaume Apollinaire à Madeleine, les dessins d’un enfant déporté, une chemise parchemin sur lequel le sang sert d’encre, c’est une écriture microscopique qui permet d’en mettre plus et d’alléger un colis, c’est la chaise d’un résistant interrogé par la Gestapo qui a tout de même écrit sous son siège un dernier message à sa femme, ou encore des morceaux de papier jetés du train qui conduisait des hommes dans un camp de concentration.


« En toute amitié à mes /  camarades féminins et masculins / qui m’ont précédé et qui me / suivront dans cette cellule- / Qu’ils conservent leur foi /  Que Dieu évite ce / calvaire à ma bien aimée / fiancée – »
(Photo © Paris – Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Marie Bruggeman. )

Ces manuscrits crient la solitude, la mort au détour du couloir, l’urgence d’écrire, le soutien, la beauté et le pouvoir de l’écrit aussi. A voir, le coeur accroché à la BNF.

Une exposition essentielle.

16 comments

    • Alexandra K says:

      Touchant, assurément ! Il y a aussi une partie plus drôle, plus folle, celle de la passion : on rit aussi dans cette expo. Elle est à l’image de la vie.

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  1. soene says:

    Hélas, la BNF est bien loin de mon petit chez moi, Leiloona.
    Mais j’aimerais beaucoup voir cette expo.
    Je traboulerai avec toi pour le Projet de Ma’ du 4 mai 2019 😆
    Bises d’O.

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      • soene says:

        Leiloona, c’est une « traboule » fictive, de blog en blog, mais les vraies sont pleines de charme et de mystère 😉
        Gros bisous

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  2. gambadou says:

    Très émouvant cette exposition, dommage que je ne sois pas à Paris, sinon j’y serais allé.

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Commentaire :

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